Menu
Libération
Justice

«Après 15 ans de combat, qu’est-ce que je dis à ma fille ?» : dans l’affaire «Julie», deux pompiers condamnés à de la prison avec sursis, le troisième relaxé

Violences sexuellesdossier
Le tribunal correctionnel de Versailles a condamné ce mercredi 27 novembre deux pompiers respectivement à quatre ans et quinze mois de prison avec sursis pour atteintes sexuelles sur Julie, qui était âgée de 14 ans au moment des faits.
La mère de Julie, lors d'un rassemblement à Paris, le 18 novembre 2020. (Alain Guilhot/Divergence)
publié le 27 novembre 2024 à 15h09
(mis à jour le 27 novembre 2024 à 21h30)

Avant l’affaire des viols de Mazan, ce dossier avait placé le consentement au cœur des débats publics et suscité l’émoi. Deux pompiers ont été condamnés ce mercredi à des peines avec sursis pour atteintes sexuelles sur mineure dans l’affaire Julie, du nom de cette adolescente qui accuse plusieurs pompiers de viols. Ceux-ci s’étaient rendus plusieurs fois à son domicile entre 2008 et 2010 pour des interventions, dans le cadre du traitement médical lourd qui suivait la jeune fille.

Pierre C. et Julien C. ont ainsi respectivement écopé de quatre ans et 15 mois de prison avec sursis, des peines au-delà de celles demandées par le ministère public - trois ans et douze mois de sursis. Les deux hommes ont également été inscrits au Fichier des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (Fijais). Seul celui condamné à la plus lourde peine, Pierre C., était présent lors du délibéré. Le tribunal a justifié ces peines «eu égard à la nature et à la gravité des faits, à leur durée dans le temps, aux circonstances de leur commission et au préjudice engendré». Un troisième pompier a lui été relaxé, comme requis par le parquet.

«C’est une gifle qu’elle prend»

Plus de 14 ans après les faits, cette décision marque la fin d’un marathon judiciaire pour Julie, un nom d’emprunt. Au sortir de la salle d’audience, émue aux larmes, la mère de la victime a confié être «effondrée». «Après quinze ans de combat, qu’est-ce que je dis à ma fille ?» s’interroge-t-elle. «C’est une gifle qu’elle prend, l’un des deux condamnés n’était même pas là pour accueillir sa peine et ils sortent libres du tribunal.»

L’audience s’est déroulée mardi 15 et mercredi 16 octobre, à huis clos, à la demande de la famille de Julie. Désormais âgée de 29 ans, la jeune femme était accompagnée de sa mère, son père et son frère. «Compte tenu de la grande publicité [autour de l’affaire], il convient de garder l’identité de Julie secrète, ainsi que son visage», avait par ailleurs plaidé Me Mehdy Kadri en tout début d’audience.

La défense des pompiers ne s’est jamais opposée à cette demande, tout en disant «regretter que, depuis quinze ans, ce procès ait lieu dans la presse à cause de la partie civile qui, au dernier moment, veut désormais exclure la presse de cette salle d’audience».

Une requalification polémique

Entre ses 13 et 15 ans, Julie, âgée de 29 ans aujourd’hui, vivait avec sa famille en banlieue sud de Paris et suivait un traitement médical lourd, à cause de fréquentes crises de spasmophilie et de tétanie. Pour lui porter secours, les sapeurs-pompiers interviendront plus de 130 fois à son domicile entre 2008 et 2010. En août 2010, l’adolescente et sa mère portent plainte pour viols en mettant en cause Pierre C. l’année précédente, dont une fois en présence de deux collègues. L’enquête durera neuf ans et vingt pompiers interviendront dans la procédure, accusés également de viols par Julie - ils reconnaîtront les relations sexuelles mais nieront tous une quelconque contrainte.

Les faits avaient ensuite été requalifiés en juillet 2019 en atteintes sexuelles, sans violence, contrainte, menace ni surprise sur mineure de moins de 15 ans par plusieurs personnes. Les trois hommes ne risquaient donc plus vingt mais sept années d’emprisonnement. Cette requalification, confirmée en appel puis en cassation, avait suscité l’indignation des associations féministes et de la famille.

Mise à jour : à 21h19, avec davantage de contexte