La vieille dame aux cheveux blancs raconte tendrement «son petit Arthur» à qui elle «faisait des nouilles au beurre» et dont elle embrasse désormais la photo, chaque matin, dans son salon. Puis elle s’approche à petits pas de la cage de verre pour demander d’une voix très émue : «J’aimerais bien que vous nous disiez la vérité. Vous nous avez enlevé un être si cher.» Plus qu’un procès, c’est l’assaut d’une «conscience verrouillée à double tour», une guerre contre les silences qui se joue devant la cour d’assises de la Savoie. Combien sont-ils, au cours des sept jours de débat, à s’être tourné vers l’homme de 38 ans, retranché derrière la vitre comme derrière son crime ? A l’avoir fixé intensément, avant de l’apostropher ? On ne veut pas «sa» vérité mais «LA» vérité, lui lance-t-on. On ne supporte plus qu’il tergiverse ou qu’il élude, l’engueule-t-on. On sait qu’il ment et que ça ne s’est pas passé comme ça, l’implore-t-on. Plus qu’un accusé, c’est une muraille contre laquelle les mots ricochent et se brisent. Nordahl Lelandais est jugé pour le meurtre d’Arthur Noyer, caporal de 23 ans. Il a reconnu le crime mais il répète : «J’ai donné la mort sans le vouloir», évoquant une «bagarre» qui a mal tourné après qu’il l’a pris en stop, la nuit du 11 avril 2017.
Dans le public, un jeune homme vêtu d’une doudoune rouge encore humide des longues heures de queue sous la pluie, résume bien le problème : «S’il n’y avait que