Rarement on l’avait vu aussi calme. Tapotant sur son téléphone, l’air faussement désintéressé, ou noircissant son bloc-notes. La veille encore, Eric Dupond-Moretti ressemblait à une cocotte-minute prête à déborder… Au septième jour de son procès pour «prises illégales d’intérêts» devant la Cour de justice de la République (CJR), le ministre de la Justice a écouté, plus de trois heures durant, le subtil réquisitoire mené à deux voix par le procureur général près la Cour de cassation, Rémy Heitz, et l’avocat général Philippe Lagauche.
Face à une salle comble et imprégnée de solennité, le duo a demandé de déclarer le garde des Sceaux coupable de ce «délit obstacle, destiné à éviter la confusion entre les affaires publiques et les affaires privées» et a requis «une peine juste et significative» : un an de prison avec sursis contre le ministre, soupçonné d’avoir usé de ses prérogatives pour se venger de quatre magistrats – un ex-juge d’instruction à Monaco et trois membres du Parquet national financier (PNF) – contre lesquels il avait eu des différends du temps où il était avocat. Concernant la peine complémentaire d’inéligibilité, dont le prononcé est obligatoire en cas de condamnation, l’accusation a indiqué aux juges qu’ils pouvaient s’en dispenser «par décision spécialement motivée».
«Cow-boy» et «dingues»
«Jamais, en prêtant mon serment de magistrat, il y a plus de trente-cinq ans, je n’aurais imaginé devoir un jour tenir le siège du ministère public dans un