Avertissement
«Libération» couvre jusqu'à la fin de l'année 2024 le procès des viols de Mazan. Ces articles relatent la description de violences sexuelles et peuvent choquer.
Rétropédalage. Après un débat initié par les avocats de la partie civile, la cour criminelle départementale du Vaucluse a finalement accepté, ce vendredi 4 octobre, de diffuser en présence de la presse et du public les vidéos des viols infligés à Gisèle Pelicot. Alors que cette dernière avait explicitement demandé que les images soient montrées aux journalistes, le président de la cour, Roger Arata, avait acté le 20 septembre leur exclusion. Une décision qui ne relevait pas d’un huis clos partiel, mais de ses pouvoirs de police de l’audience, lui permettant de rejeter «tout ce qui tendrait à compromettre [la] dignité» des débats, selon le code de procédure pénale.
La cour a donc finalement décidé ce vendredi la «publicité totale des débats». Les vidéos concernant les accusés seront diffusées dans l’après-midi : l’ensemble des personnes présentes dans la salle d’audience pourra y assister. Il a été précisé qu’au regard du «caractère attentatoire» des images, leur diffusion sera systématiquement précédée d’une «annonce permettant de quitter la salle».
«Les vidéos déjà diffusées n’ont causé aucun trouble»
«Le débat dans lequel la défense essaie d’inviter la cour à la suivre, en opposant le pouvoir de police du président d’un côté et de l’autre, le droit de la partie civile, est un débat d’arrière-garde qui a été tranché il y a quarante-quatre ans, au moment du vote sur l’article 306 de la procédure pénale», avait argumenté en ouverture d’audience Stéphane Babonneau, l’un des avocats de Gisèle Pelicot. Même la représentante du ministère public, qui avait prôné le huis clos en première intention en début de procès, acquiesce à sa suite : «L’évacuation d’une salle d’audience est décidée dans des cas très limités, non par pour le contenu des débats mais pour le comportement des personnes dans la salle. Les vidéos déjà diffusées [avant le 20 septembre et la décision du président, ndlr] n’ont causé aucun trouble, je demande donc à la cour de faire droit à la demande de la partie civile.»
En réponse, trois avocats de la défense tiendront longtemps la barre pour inverser la tendance. C’est Nadia El Bouroumi, avocate de deux accusés et au centre d’une polémique récemment après une vidéo où elle se mettait en scène en train de chanter, qui a clôturé leurs interventions, hurlant à la cour : «Mes confrères sont allés chercher des textes parlementaires. En cour d’assises, on juge des accusés. Ont-ils droit à une défense ? Depuis le début du procès, nous sommes dans une situation de dictature médiatique. Donnez-nous la possibilité d’exercer notre métier ! Parce que j’enlève ma robe si je ne peux pas poser de questions lors de la diffusion des vidéos. Je suis très courageuse, mais c’est très difficile, le procès Pelicot… Faites en sorte que l’on puisse intervenir sans être systématiquement humilié par cette presse !»
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Il est rare qu’une affaire de viol puisse être jugée avec autant de preuves matérielles. Dominique Pelicot, poursuivi pour avoir violé et organisé le viol de son épouse par des dizaines d’inconnus recrutés sur Internet, prenait soin de filmer et photographier les sévices qu’elle subissait, alors qu’elle était plongée dans un état comateux profond. Ces images ont notamment permis d’identifier les accusés, et témoignent de l’enfer vécu par Gisèle Pelicot, privée de souvenirs à cause des médicaments que lui administrait son ex-mari.