Outre Nicolas Sarkozy dans l’affaire Bygmalion, le tribunal a reconnu coupables 13 coprévenus, notamment d’escroquerie ou complicité. Tous ont été condamnés pour avoir, à un degré ou un autre, participé au système de double facturation imaginé pour masquer l’explosion des dépenses du candidat jusqu’à un total de 42,8 millions d’euros, près du double du plafond légal. Toutes les peines sont plus lourdes que celles requises par le parquet ; celles de prison ferme seront aménagées sous surveillance électronique à domicile.
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Guillaume Lambert. Il écope de trois ans de prison dont dix-huit mois ferme. L’ancien chef de cabinet de Nicolas Sarkozy à l’Elysée puis directeur de sa campagne présidentielle n’a pas su freiner le train fou sur sa lancée, prônant en vain des petits meetings locaux, minorant volontiers son rôle prépondérant à celui d’un simple secrétaire en charge de l’agenda de Nicolas Sarkozy. Il a assuré que le système de fausse facturation des meetings s’était organisé à son insu et précisé avoir pris des mesures «très claires, très fermes» dès qu’il a été prévenu des risques de dépassement. Mais il admet que la problématique du dépassement des dépenses électorales était devenue en fin de course «un non-sujet». Emmanuel Macron l’a depuis nommé à la tête d’une mission sur la future 5G.
Jérôme Lavrilleux. Ce proche de Jean-François Copé, qui avait suggéré l’agence Bygmalion pour l’organisation des meetings de la campagne après avoir été choisi par Nicolas Sarkozy comme numéro deux de son équipe en 2012, avait reconnu longtemps avant l’audience avoir couvert le système de fausses factures. On se souvient encore de ses larmes en direct sur BFM TV… Ancien député européen, il a depuis refait sa vie en gérant des chambres d’hôte. Il est condamné à trois ans de prison dont un an avec sursis pour abus de confiance et complicité de financement illégal de campagne électorale. Une peine bien plus sévère que celle réclamée par le parquet.
Bastien Millot. Le président de Bygmalion, dont la filiale a été chargée de l’organisation des meetings, a maintenu au procès, à l’encontre des déclarations de ses associés, ne pas être au courant de la fausse facturation imputée à l’UMP à la place du compte de campagne du candidat Sarkozy. Il écope d’une lourde peine : trois ans de prison dont 18 mois avec sursis pour complicité d’usage de faux, complicité d’escroquerie et complicité de financement illégal de campagne électorale, ainsi que de 100 000 euros d’amende. Avec Sarkozy, il est le seul à ne pas s’être présenté au tribunal hier pour entendre le prononcé du jugement.
Guy Alves. Numéro deux de Bygmalion, il a livré dès le début de l’affaire la double comptabilité de l’agence aux enquêteurs, reconnaissant avoir accepté le dispositif de fausses factures que l’équipe de campagne ou l’UMP aurait souhaité instaurer afin de faire régler par le parti les dépenses gigantesques de la campagne de Sarkozy. Le tribunal lui inflige deux ans de prison dont un an avec sursis et 100 000 euros d’amende. Il est reconnu coupable de complicité de faux, d’usage de faux, d’escroquerie et de financement illégal de campagne électorale. Il est l’un de ceux dont la peine infligée n’est que légèrement supérieure à celle demandée par le parquet.
Eric Cesari. Avec son poste de directeur général de l’UMP, validant à ce titre toutes les fausses factures imputées au parti, il est l’un des prévenus à avoir le plus nié être au courant de la moindre malversation, quoique surnommé «l’œil de Sarko» au sein du parti. «L’homme qui n’a rien vu, rien su, rien compris», ironise l’accusation, le tribunal lui faisant payer – un peu plus que les autres – ses dénégations confinant au comique de répétition : trois ans de prison dont deux ans ferme. Licencié en 2014 de l’UMP, il obtiendra aux prud’hommes 159 000 euros. Il dirige actuellement le syndicat de traitement des ordures de la région parisienne.
Fabienne Liadzé. La petite main de l’UMP avait le titre de directrice des affaires financières, décrite comme la plus opérationnelle quand il s’agissait d’endosser les surfacturations des conventions fictives, faussement imputées au parti. Seule femme parmi les prévenus, elle a parfois eu le dos bien large au cours des débats. Elle aussi licenciée par la suite de l’UMP, elle est actuellement conseillère municipale à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine). Elle écope d’une peine de trois ans de prison dont dix-huit mois avec sursis et une peine d’inéligibilité de cinq ans.
Pierre Godet. L’expert-comptable de la campagne avait un rôle clé, notamment celui d’alerter le candidat sur la dérive des dépenses, ce qu’il fera à deux reprises, en mars et avril 2012, pointant un probable dépassement du plafond. Mais validant néanmoins les comptes de campagne frelatés déposés devant le Conseil constitutionnel. Le tribunal l’a jugé notamment coupable d’escroquerie pour avoir «intégré en connaissance de cause dans le compte de campagne de Nicolas Sarkozy un ensemble de factures sous-évaluées». Et l’a condamné à trois ans de prison dont dix-huit mois avec sursis, deux ans d’interdiction professionnelle et 60 000 euros d’amende.
Et les autres… Qu’ils soient expert-comptable (Marc Leblanc), président de l’Association de financement de la campagne de Nicolas Sarkozy (Philippe Briand) ou son trésorier (Philippe Blanchetier), directeur de communication de l’UMP (Pierre Chassat), associé de Bygmalion (Sébastien Borivent) ou dirigeant de sa filiale Event et Cie (Franck Attal), l’homme qui a organisé les meetings pendant la campagne de 2012, pas un n’échappe à la condamnation à de la prison, dont une partie avec sursis. Ils sont jugés coupables d’avoir signé des engagements de dépenses pour des conventions fictives du parti, participé à la fraude au sein de l’agence de communication ou avoir sciemment laissé exploser le compte de campagne du candidat Sarkozy.