Le 27 juin 2023, Nahel était tué par un tir d’un policier, à Nanterre. Un peu moins d’un an après, dimanche 5 mai, la justice a organisé une reconstitution de la scène de la mort du jeune homme de 17 ans en présence des protagonistes pour les confronter à leurs déclarations contradictoires sur les circonstances qui ont mené un motard de la police à tirer sur l’adolescent. Au cœur des débats de ce dossier, érigé symbole du débat sur les violences policières, une question centrale : le brigadier Florian M. âgé de 38 ans au moment des faits, mis en examen pour homicide volontaire, avait-il une raison légitime d’utiliser son arme pour tirer sur Nahel lors d’un contrôle routier ?
Malgré les 14 heures de reconstitution, les visions des parties diffèrent toujours diamétralement les unes des autres. D’un côté, il y a la version de l’avocat de la mère de Nahel : «La reconstitution s’est fondée sur les vidéos, ce qu’on voit sur les vidéos c’est que le policier n’était pas en danger. Par conséquent, l’usage de son arme n’était pas nécessaire», a tranché maître Nabil Boudi, sur RTL, avant d’ajouter que la mère de l’adolescent a vécu un moment «particulièrement douloureux» puisqu’elle était en présence des policiers dimanche.
Cette vidéo, diffusée sur les réseaux sociaux, montre les deux policiers sur le côté du véhicule, braquant le conducteur de leurs armes. L’un d’eux, le brigadier Florian M., lui tire dessus alors que le véhicule redémarre. La voiture jaune s’encastre ensuite dans un bloc de béton, quelques dizaines de mètres plus loin. Publiée quelques heures après la mort du jeune homme, cette vidéo est venue infirmer la version policière, qui disait que Nahel avait foncé sur le motard. Les policiers ont maintenu qu’ils étaient en danger de mort car coincés entre la voiture et un mur. Rappelant que la version initiale des policiers avait évolué, maître Boudi a appelé «chacun à tirer les conséquences» de ce changement de version.
«On peut aller vers le non-lieu»
Or selon l’avocat du brigadier, Laurent-Franck Liénard, cette première version ne venait pas de son client mais des services de police. D’après lui, le brigadier a respecté les consignes encadrant l’usage de son arme. «On peut aller vers le non-lieu, toutes les conditions sont remplies», estime-t-il après la reconstitution, comme il l’a affirmé sur BFMTV. Pour Maître Liénard, cette reconstitution était importante car sur la vidéo, «on ne voit pas que (mon client) est coincé dans un trottoir, que juste derrière lui, il y a un mur» : «Objectivement, il n’a pas été écrasé, mais il a pu ressentir qu’il aurait pu l’être.»
Par ailleurs, «les autres occupants de l’espace public vont être en danger» si les policiers laissent à ce moment-là repartir Nahel qui, à 17 ans, n’avait pas le permis, a ajouté l’avocat. Or «dans ce cas-là, toutes les fois où un véhicule démarre suite à un refus d’obtempérer, il faut tirer», a fait remarquer avant lui maître Boudi : «On ne peut pas utiliser une arme létale à bout portant face à une hypothèse».
Après avoir été placé en détention provisoire pendant cinq mois, Florian M. a été libéré et placé sous contrôle judiciaire après plusieurs demandes de son conseil. A la suite de la remise en liberté du policier, Mounia, la mère de Nahel qui l’élevait seule, avait appelé à un rassemblement auquel plusieurs centaines de personnes s’étaient rendues dans le calme.