CSI 93 : ce sigle devait être synonyme d’«excellence» et de «modernité» dans la police. Treize ans après sa création sous l’impulsion de Michèle Alliot-Marie, alors ministre de l’Intérieur, la Compagnie de sécurisation et d’intervention de Seine-Saint-Denis est au contraire le symbole des pires dérives et violences dans cette administration. «On ne voit ça que dans les films, dans les séries américaines», résume une des victimes de cette unité. La fiction a bel et bien rattrapé la réalité.
Si le nom de cette compagnie ne vous est pas inconnu, c’est qu’elle a été au cœur d’un vaste scandale durant l’été 2020. Pas moins de 17 enquêtes judiciaires ont visé les agissements de membres de cette unité pour des coups, des propos racistes, le racket de dealers, des interpellations illégitimes ou des procédures montées de toutes pièces. L’ampleur de l’affaire poussera le patron de la préfecture de police de Paris, Didier Lallement, à annoncer la dissolution de la compagnie… avant d’y renoncer discrètement. La CSI 93 existe toujours : son organisation et ses missions n’ont pas changé. La plupart des 150 membres de la compagnie sont restés en poste, et une dizaine d’enquêtes menées sur ses agents ont été classées sans suite par le parquet de Bobigny.
Vidéo
Comment est-ce possible ? Les preuves manquent-elles ? L’enquête de Libération explore pourtant des vidéos, des retranscriptions de sonorisations dans des véhicules, des échanges de messages, une dizaine de rapports de l’Inspection générale de la police nationale, ou encore des auditions de personnes interpellées. Les éléments sont édifiants, chaque affaire documentée est accablante. Que faut-il de plus ? Des morts ? «Si j’avais l’droit de te tuer je le ferais», menace un policier dans l’un des enregistrements auquel Libé a eu accès. Comment laisser ceci «sans suite» ?