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Justice

Une première prison de haute sécurité pour narcotrafiquants effective cet été

Gérald Darmanin a détaillé ce jeudi 23 janvier son projet de prison de haute sécurité dédiée aux narcotrafiquants, qui doit ouvrir d’ici fin juillet. Le ministre de la Justice a également annoncé le doublement, d’ici 2027, des places de semi-liberté, et la création en 2026 d’une «police pénitentiaire».
Le garde des Sceaux, Gérald Darmanin, à l'Ecole nationale d'administration pénitentiaire, le 23 janvier. (Philippe Lopez/AFP)
publié le 23 janvier 2025 à 16h30

L’annonce avait divisé surveillants pénitentiaires, magistrats et avocats. Le ministre de la Justice Gérald Darmanin a détaillé ce jeudi 23 janvier les contours de son projet de prison de haute sécurité dédiée aux narcotrafiquants : la structure devrait devenir «réalité» fin juillet, avant l’ouverture de deux autres d’ici deux ans, pour détenir «plus de 600» narcotrafiquants «particulièrement dangereux».

Le premier lieu où doivent être transférés, à partir du mois de mars, les 100 plus gros narcotrafiquants du pays, quel que soit leur statut de détention, n’a pas été précisé par le ministre de la Justice, qui devrait annoncer son choix «dans le mois qui vient». «Je suis encore en train de visiter des établissements, il y en a trois-quatre en France qui sont capables d’accueillir» ces détenus, «avec évidemment beaucoup de travaux et un changement très profond du fonctionnement de la prison», a-t-il déclaré à la presse après un discours devant les étudiants de la 219e promotion de l’Ecole nationale de l’administration pénitentiaire (Enap) à Agen.

«Changement profond et radical»

«Quatre millions d’euros» ont été débloqués pour la mise en place de cet établissement rénové, dont les pensionnaires seront «mis à l’isolement total» dans un lieu «inviolable», où il sera «absolument impossible de se faire livrer téléphone ou drogue», a promis le garde des Sceaux en rappelant que 52 000 portables ont été saisis l’an dernier en prison.

Actuellement, 17 000 personnes sont détenues pour des faits liés au trafic de stupéfiants et à la criminalité organisée, selon lui, dont «au moins un millier» considérés comme «particulièrement dangereux». «Une très grande partie […] ont une surface financière importante, des complicités haut placées et désormais une violence totalement désinhibée, comme l’a démontré le drame d’Incarville le 14 mai dernier», a souligné M. Darmanin. Deux agents pénitentiaires avaient été tués et trois autres blessés lors de l’attaque ultraviolente de leur fourgon au péage d’Incarville (Eure) pour libérer Mohamed Amra. Ce narcotrafiquant, soupçonné d’avoir commandité des meurtres alors qu’il était en détention, est toujours recherché, ainsi que ses complices. Pour le ministre, «il y a encore beaucoup d’efforts à faire» pour qu’une nouvelle affaire Amra ne se reproduise pas, la dangerosité de certains détenus exigeant «un changement profond et radical du fonctionnement de l’administration pénitentiaire», à commencer par la différenciation des établissements.

Expulsion des étrangers condamnés

Estimant que l’état général des prisons n’est «pas digne d’un pays comme la France», avec «4 000 matelas par terre» et des détenus mélangés «selon, non pas leur dangerosité, mais leur arrivée devant la justice», Gérald Darmanin a également annoncé le doublement, d’ici 2027, des places de semi-liberté pour éviter à leurs bénéficiaires les cellules surpeuplées. «C’est-à-dire 3 000 places que nous construirons dès la fin de cette année, en rénovant complètement les constructions et les cahiers des charges des lieux pénitentiaires», a-t-il précisé, appelant à écouter davantage les élus locaux «prêts à accueillir des lieux privatifs de liberté mais pas toujours des prisons pour personnes extrêmement dangereuses».

Parmi les autres mesures annoncées, une mission sera lancée pour que l’administration pénitentiaire puisse organiser, en lien avec les préfectures, l’expulsion des personnes étrangères définitivement condamnées. «Il n’y a pas de raison que les personnes de nationalités non françaises restent dans nos lieux de détention», a déclaré Gérald Darmanin en rappelant que, «selon les normes» de l’UE, les détenus européens devraient déjà purger leurs peines dans leur pays d’origine.

L’ancien ministre de l’Intérieur a également annoncé la création, en 2026, d’une «police pénitentiaire» qui sera «la troisième force de sécurité intérieure» du pays, en plus de la police et de la gendarmerie. Une réflexion sera parallèlement engagée pour «recréer» une inspection générale de l’administration pénitentiaire. Enfin, le nombre d’élèves formés à l’Enap va augmenter, selon l’école, avec désormais deux promotions de 800 chaque année et une formation qui passera de six à huit mois.