La nuit qui tombe sur Marseille est tellement calme qu’elle en paraît suspecte. Il est 21 heures, sur l’esplanade face au quai, un type a installé un fauteuil en velours pour mieux veiller sur sa canne à pêche. Derrière lui, un peu plus haut sur la Canebière, un groupe joue au foot. Assis les pieds presque dans l’eau, trois vingtenaires roulent des cigarettes et tuent le temps au clair de (pleine) lune. Des «tourists, from London», qui viennent à peine d’arriver en ville, expliquent-ils. A un jour près, l’accueil n’était pas le même. Au même endroit à la même heure, samedi comme vendredi, des groupes plutôt jeunes, parfois masqués, couraient dans tous les sens pour échapper aux policiers arrosant les lieux de lacrymogènes. Des poubelles brûlées, des magasins littéralement vidés en bande organisée, des centres commerciaux investis dans les quartiers… Et puis ce dimanche, après deux jours d’émeutes, Marseille se couche comme si de rien n’était.
«C’est fragile, hein ?»
Ou presque. A deux pas du Vieux-Port, les rues Saint-Ferréol et Paradis, parmi les plus commerçantes du centre-ville, son