Comment une femme de 34 ans est-elle tombée, à la fin des années 80, dans les griffes de l’abbé Pierre qui a mené une double vie et se trouve aujourd’hui accusé post mortem de violences sexuelles ? Car la hiérarchie catholique et ses proches collaborateurs à Emmaüs ont été mis au courant de la conduite problématique du religieux avec les femmes dès les années 50. Notamment à la suite d’un voyage désastreux aux Etats-Unis, raconté par le philosophe Jacques Maritain dans des carnets inédits. En 1958, l’abbé Pierre est également interné de longs mois dans une clinique psychiatrique en Suisse. Et progressivement écarté de la direction d’Emmaüs.
Dans une lettre datée du 27 juin 1958, que Libération a consultée et citée également par le Monde, le cardinal archevêque de Paris Maurice Feltin répond au ministre des Anciens Combattants, Edmond Michelet, pour expliquer qu’il n’est pas opportun d’attribuer une nouvelle décoration à l’abbé Pierre alors qu’il est envisagé de le promouvoir officier de la Légion d’honneur. «L’intéressé est un grand malade», écrit Fel