Le tribunal administratif de Grenoble a suspendu ce mercredi soir une disposition du nouveau règlement des piscines municipales de la ville autorisant le port du burkini, estimant qu’elle «[porte] gravement atteinte au principe de neutralité du service public». Le tribunal se prononçait suite au dépôt par le préfet de l’Isère d’un «référé laïcité» réclamant la suspension de cette mesure controversée. Le nouveau règlement des piscines, porté par la majorité du maire écologiste de Grenoble, Eric Piolle, devait initialement entrer en vigueur le 1er juin.
Le tribunal relève que l’article en cause permet aux usagers de « déroger à la règle générale d’obligation de porter des tenues ajustées près du corps pour permettre à certains usagers de s’affranchir de cette règle dans un but religieux », et ses auteurs ont par là-même « gravement porté atteinte au principe de neutralité du service public ».
Lundi 16 mai, le conseil municipal avait adopté à une très courte majorité – 29 voix «pour», 27 «contre» et deux abstentions – un nouveau règlement intérieur établissant que les usagers pourraient, à partir du 1er juin, choisir librement leur tenue de bain tant qu’elle respecte les normes d’hygiène et de sécurité. Le maillot couvrant intégral, dit «burkini» lorsqu’il est porté par conviction religieuse, comme le topless féminin devaient donc être autorisés dans les bassins grenoblois. «Il n’y a plus d’injonction différenciée selon le genre» des baigneurs et baigneuses, se félicitait la municipalité à l’issue du vote.
Reportage
Mais le préfet de l’Isère, Laurent Prévost, avait annoncé la veille du vote que, «conformément aux instructions reçues du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin», il saisirait le tribunal administratif «d’un référé laïcité en vue d’obtenir la suspension» de la délibération, en parallèle d’un «déféré d’annulation». Le nouveau règlement a selon le préfet pour «objectif manifeste» de «céder à des revendications communautaristes à visées religieuses» et «paraît contrevenir» au principe de laïcité de la loi de 1905 et à la loi de 2021 sur le respect des principes de la République.
Le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin s’est immédiatement félicité sur Twitter de cette « excellente nouvelle ». « Suite à notre recours, le tribunal administratif suspend la délibération de la mairie de #Grenoble autorisant le burkini dans les piscines municipales grâce aux outils de la loi séparatisme voulue par @EmmanuelMacron ! », a-t-il salué.
Excellente nouvelle : suite à notre recours, le tribunal administratif suspend la délibération de la mairie de #Grenoble autorisant le « burkini » dans les piscines municipales grâce aux outils de la loi séparatisme voulue par @EmmanuelMacron !
— Gérald DARMANIN (@GDarmanin) May 25, 2022
Les juges des référés ont rendu leur jugement dans la soirée après avoir entendu pendant environ une heure trente les arguments des différentes parties, la préfecture de l’Isère d’une part, la Ville de Grenoble, l’association Alliance Citoyenne et la Ligue des Droits de l’Homme d’autre part, lors d’une audience tenue plus tôt dans l’après-midi.