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Libération
Le portrait

Kahina Bahloul, soufie d’y croire

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La première imame de France, qui tire son nom d’un ascète et d’une reine berbère, défend un islam égalitaire et libéral.
Kahina Bahloul, le 23 mars, à Paris. (Roberto Frankenberg/Libération)
par Thibaut Sardier et photos Roberto Frankenberg
publié le 12 avril 2021 à 20h00

S’il y a un voile qui entoure Kahina Bahloul, 42 ans, ce n’est pas celui que revêtent certaines femmes musulmanes : elle refuse de le porter en dehors de la prière, car rien dans les textes de l’islam ne l’impose. Il s’agirait plutôt du voile de mystère composé par son visage un brin impassible et son dos toujours droit comme un «i». Devenir la première femme imame de France, se mettre au service d’un islam égalitaire et libéral et créer une mosquée – baptisée Fatima – où elle mène la prière depuis début 2020 sont autant d’engagements qui l’exposent à l’incompréhension comme aux menaces. Aussi n’en dira-t-elle pas plus sur sa vie privée – «le culte de la personnalité dans le monde arabo-musulman me donne de l’urticaire» – que ce qu’elle raconte dans Mon Islam, ma liberté (Albin Michel), un remarquable essai où elle mêle récit autobiographique depuis sa naissance à Paris, géopolitique de l’islam dans le monde contemporain et réflexions théologiques qui ravivent un «islam des Lumières» trop longtemps négligé. Doctorante sous contrat à l’Ecole pratique des hautes études (Ephe), elle se bat pour développer une approche historico-critique de l’islam.

On pourrait soupçonner chez elle un tempérament provocateur, renvoyant dos à dos les religieux conservateurs de tout poil et ceux des laïcards qui disent l’islam incompatible avec la République ou s’inquiètent de l’islamo-gauchisme à l’université. Sauf qu’elle n’agit pas par provocation mais par vocation. Voire par conve