L’affaire traînait depuis début avril. Cette fois-ci, le Premier ministre, Jean Castex, a officiellement acté, la fin de l’Observatoire de la laïcité (ODL), au centre de violentes polémiques depuis l’automne à la suite de l’assassinat du professeur d’histoire-géographie Samuel Paty dans un attentat terroriste à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines). Il sera remplacé par un Comité interministériel de la laïcité dont le «décret de création sera publié dans les tout prochains jours», indique ce vendredi un communiqué du Premier ministre.
La nouvelle instance aura pour fonction, d’après Matignon, de «coordonner l’action du gouvernement afin de s’assurer du respect et de la promotion du principe de laïcité par l’ensemble des administrations publiques». Sa première réunion se tiendra le 12 juillet afin de «valider les premières orientations de l’action du gouvernement». Comme le défunt Observatoire de la laïcité, le Comité interministériel sera placé sous l’autorité du Premier ministre. Ce choix a minima du gouvernement est un échec pour Marlène Schiappa, ministre déléguée à la Citoyenneté, très active dans ce dossier et qui proposait ces derniers mois de créer un nouveau service au sein du ministère de l’Intérieur sur lequel elle aurait eu l’autorité.
Périmètre rétréci
Cette refonte s’inscrit, selon Matignon, dans le cadre de la future loi contre le séparatisme, discutée à nouveau à l’Assemblée nationale à partir du 28 juin. Dans son communiqué, le Premier ministre rappelle que le projet de loi contient des exigences de formation en matière de laïcité pour les agents publics et la mise en place de référents laïcité dans toutes les administrations, y compris les fonctions publiques hospitalières et territoriales.
Tel qu’il se dessine, le Comité interministériel de la laïcité voit son périmètre nettement rétréci par rapport à l’Observatoire. Créé en 2007, réellement actif depuis 2013, ce dernier était présidé par l’ancien ministre socialiste Jean-Louis Bianco. Il intervenait au-delà de la seule formation des fonctionnaires, analysant les évolutions de l’application du principe de laïcité et faisant des propositions au gouvernement. Il avait ainsi été à l’origine de l’abolition du délit de blasphème dans le droit local de l’Alsace-Moselle.
Fronde des milieux ultralaïcs
L’actuel gouvernement souhaite manifestement ménager Jean-Louis Bianco, très malmené par les polémiques à répétition contre l’ODL. Ce dernier, dont le mandat était arrivé à échéance début avril, a été reçu, ce vendredi, par le Premier ministre. Les milieux ultralaïcs, notamment ceux proches de l’ancien Premier ministre Manuel Valls ou du Printemps républicain, reprochaient son manque de fermeté, voire ses connivences, avec les milieux islamistes – accusations infondées. La tension était manifeste depuis la vague d’attentats terroristes de 2015 et n’avait pas cessé de grimper.
Animé par une équipe très réduite, l’Observatoire de la laïcité a produit un important corpus d’analyses de l’état de la laïcité en France. A l’automne, au plus fort des polémiques, il avait reçu le soutien de nombreux universitaires parmi lesquels les spécialistes reconnus de l’histoire et de la sociologie de la laïcité. Plusieurs députés de La République en marche avaient aussi félicité le travail mené par l’observatoire.