«Les Juifs sont des hommes, les Juives sont des femmes. Tout n’est pas permis contre eux, contre ces hommes, contre ces femmes, contre ces pères et mères de famille. Ils font partie du genre humain. Ils sont nos frères.» Le 23 août 1942, le cardinal Jules-Géraud Saliège, l’archevêque de Toulouse, fait lire dans les paroisses de son diocèse une lettre de protestation contre les mesures antijuives de Vichy. La fin de cet été 1942 sera un tournant. Quatre autres prélats catholiques, les évêques et archevêques de Montauban, Lyon, Marseille et Albi, protestent à leur tour. La brutalité des rafles de l’été a provoqué ce basculement. L’épiscopat, lui, officiellement, se tait. Tout comme il l’a fait à la suite de l’adoption par Vichy des deux lois portant sur le statut des Juifs, en octobre 1940 et en juin 1941.
«Les prises de position de ces cinq archevêques et évêques ont fait dérailler la solution finale en France», explique l’historien Tal Bruttmann. Par leur poids sur l’opinion publique, par les difficultés qu’elles créent au régime de Pétain. En fait, 76 000 Juifs seront déportés de France parmi lesquels plus de 11 000 enfants (2 566 survivants seront comptabilisés à la libération des camps) ; les trois quarts de la population juive de France ont échappé à la déportation.
Une entreprise difficile
Quelle a été l’attitude des Eglises chrétiennes face à la Shoah ? Cette histoire, nourrie de polémiques mais moins monolithique qu’on ne le pense, est l’objet d’une exposition, «A la grâce de Dieu