Joseph Nicolini, 91 ans, déboule aux premières notes de l’entêtante Jerusalema. Jambes frétillantes, gestes souples, déhanché fringant. Dans la grande salle commune, l’atelier danse a débuté depuis quinze minutes déjà. Il est en retard. Mais qu’importe, c’est l’heure de son grand retour, après des mois sans pouvoir se mouvoir devant tant de spectateurs. Il rayonne dans son tricot bleu. Tout son monde est là. Le personnel de l’Ehpad et les résidents de son étage enfin réunis. Béret sur le côté et mains accrochées à son déambulateur, il s’approche en rythme du groupe euphorique déjà constitué, disposé sur trois rangées assises pour ne pas trop s’essouffler. Certains de ses amis tapotent du pied, d’autres font tourner leur canne. «On n’est pas des mous hein !» se bidonnent-ils. Encouragé par les applaudissements et les éclats de joie, Joseph Nicolini finit son show les bras en l’air, virevoltant. Son sourire, à tomber par terre, laisse entrevoir sa seule dent de devant. Instant de félicité en ce petit matin de la mi-mars. Et si tout s’éclaircissait ?
«Aucun moment de répit»
Le Verger des Coudry, établissement associatif d’hébergement pour personnes âgées dépendantes de Cervens, campé à flanc de colline entre les conifères de Haute-Savoie, sort tout juste d’une année «monstrueuse», selon les mots de son directeur, Eric Lacoudre. La première vague a emporté 23 des 84 résidents. Le deuxième confinement a accentué les peines et empêché les cœurs de se consoler. «Le virus nous a terr