Juliana (1) n’a pas sommeil. Vêtue d’une robe de nuit rose bonbon, la nonagénaire toque à la porte du bureau des soignantes. Il est 21 heures passées, les Lumières d’automne – l’Ehpad public de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) – s’éteignent peu à peu dans les chambres. Mais Juliana, elle, s’imagine plutôt danser. Peut-être même entonner quelques mélodies de sa propre composition. Entendre sa «douce» voix est devenu un plaisir d’habitués : elle chante «tout le temps», rigole Lindsay, l’une des aides-soignantes, en regardant Juliana s’éloigner vers sa chambre. «Elle vit la nuit, tout simplement.»
Le bruit des pas de Juliana sur le chemin de son lit se mêle aux sons nocturnes. Le claquement d’un interrupteur, les ronflements d’un voisin ou les grésillements d’une radio. Il y a aussi le ronronnement d’un film à la télévision, les déambulations des résidents et quelques éclats de rire. Chaque soir, quand les visites sont terminées et que l’Ehpad se vide de son personnel, deux aides-soignantes prennent en main l’ensemble de l’établissement. Cette nuit de décembre, Lindsay et Koumba, 28 ans et 33 ans, débutent leur garde à 21 heures et ne quitteront pas leur poste avant 7 heures du matin. Et le 24 décembre au soir, l’organisation sera la même. Avec sa dizaine d’années d’exp