Signe que la société est prête à aller de l’avant sur le sujet, l’annonce hier par Emmanuel Macron dans Libé et la Croix de son projet de loi pour une «aide à mourir» n’a pas suscité une énorme levée de boucliers dans le monde politique. Même chez les plus conservateurs, chacun semble s’armer de prudence, évitant soigneusement d’aborder le sujet ou jouant sur les mots pour ne pas se mettre à dos une partie de leur électorat.
Interrogé sur les annonces du président de la République dans la matinale de CNews et Europe 1, l’eurodéputé François-Xavier Bellamy, tête de liste LR aux prochaines élections européennes, a longtemps tourné autour du pot. «La question est évidemment d’une infinie difficulté et elle touche la vie de milliers de personnes dans notre pays. Mais personne n’est dupe du moment dans lequel ça intervient, on voit le président de la République qui emmène le pays dans un débat infiniment complexe au moment où on devrait se concentrer sur l’enjeu des trois mois qui viennent», a-t-il d’abord déclaré. Avant, face aux multiples relances de Sonia Mabrouk, de laisser entendre que l’aide à mourir voulue par Emmanuel Macron ouvrirait la voie à un «danger», prenant l’exemple de la Belgique où «la loi autorise l’euthanasie pour les mineurs».
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Son collègue, le sénateur LR de Vendée Bruno Retailleau, s’est pour sa part montré plus direct sur X (ex-Twitter) : «Ce que propose Emmanuel Macron est bien une loi d’euthanasie. La vraie fraternité n’est pas de donner la mort mais de donner la main : nous n’avons pas besoin d’une nouvelle loi mais de nouveaux moyens pour garantir l’accès de tous aux soins palliatifs.» Même son de cloche chez Gilbert Collard, député européen (ex-Rassemblement national) : «Macron annonce pour avril un projet de loi pour une “aide à mourir” : les Français préféreraient une “aide à vivre” ; à vivre en bonne santé, en sécurité et avec un salaire décent ! Non à l’euthanasie !»
La gauche discrète, la macronie se réjouit
A gauche, les réactions ont aussi été rares et mesurées. La députée insoumise Caroline Fiat, aide-soignante au civil, a salué sur X une «interview [qui] est de bon augure» : «Dans l’attente du texte, dans lequel nous nous engagerons pleinement avec mon groupe en restant vigilants. La fin de vie est un sujet primordial et je suis ravie que nous puissions enfin légiférer.» Pour la secrétaire du PS 49, Silvia Camara-Tombini, Emmanuel Macron a dessiné les contours d’une «loi que comme beaucoup de Français j’attends depuis longtemps» : «J’espère que ce projet de loi répondra aux attentes de tous ces Français qui souffrent et qui veulent pouvoir choisir de mourir sans être contraints d’aller à l’étranger.»
Les réactions les plus nombreuses (et les plus dithyrambiques) sont sans surprise à chercher dans le camp de la majorité. En bons soldats, nombre de macronistes ont salué les annonces du Président. Certains ont même sauté sur X pour réagir au plus vite, comme le député Olivier Falorni, défenseur de longue date d’une fin de vie libre et choisie, qui a vanté une «interview qui fera date» et une «réflexion profondément humaniste» du Président dans laquelle il se «retrouve»… deux minutes seulement après la parution de son interview dans Libération.
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La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, ou la tête de liste Renaissance aux européennes, Valérie Hayer, se sont également félicitées de la présentation prochaine du texte de loi. «Enfin ! Le Président a tranché : le gouvernement présentera un projet de loi avec un droit à l’aide active à mourir pour les personnes victimes d’une maladie incurable, s’est pour sa part réjoui l’ancien ministre de l’Ecologie François de Rugy. Le Parlement devra préciser ce qui relève de l’expertise des médecins et ce qui relève de la liberté de chacun.»