Il est de plus en plus question de traiter la santé mentale par filières, en isolant les dépressions, les schizophrénies, les toxicomanies, l’hyperactivité… Cette tendance, qui vise à pallier le manque d’effectifs, criant en psychiatrie, est-elle efficace d’un point de vue clinique ? Pour le psychiatre Bruno Falissard, polytechnicien, pédopsychiatre, directeur du plus gros laboratoire de recherche sur la santé mentale, la filiarisation de la psychiatrie pourrait induire de renoncer à une certaine complexité dans la prise en charge des patients.
On parle de plus en plus de traiter les malades mentaux par «filières». Est-ce une bonne idée ?
La tendance est, en tout cas, claire, avec un élan qui vient à la fois de l’administration et de certains de mes collègues psychiatres, plutôt universitaires. Les raisons en sont multiples. D’un côté, cette évolution peut paraître raisonnable. Le savoir sur les maladies mentales devenant de plus en plus riche et dense, tout le monde ne peut le suivre. Et si parallèlement les diagnostics se font précis, alors oui, tout cela pourrait pousser à une spécialisation légitime, comme on l’a connu dans le reste de la médecine. Regardez en chirurgie orthopédique, il y a désormais des spécialistes du genou, de la hanche, etc. En plus, il y a des pays où cela se passe ainsi, comme au Canada.
Les partisans mettent en avant le souhait de ne pas mélanger dans un même lieu des malades différents…
C’est un argument qui se discute. Car si on le ret