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Libération
Suite et (pas) fin

Covid-19 : Sanofi arrête la recherche pour son vaccin à ARN messager, mais pourrait s’en servir contre d’autres virus

La pandémie de Covid-19 en Francedossier
Le groupe pharmaceutique français a décidé de stopper le développement de son produit utilisant la technique de l’ARN messager, car il serait produit trop tard, mais souhaite continuer à travailler sur cette technologie.
L’entreprise pharmaceutique française juge que le vaccin arriverait trop tard sur le marché. (Riccardo Milani/Riccardo Milani)
publié le 28 septembre 2021 à 8h21
(mis à jour le 28 septembre 2021 à 13h34)

On ne dira pas que c’est un échec, on dira que ça n’a pas marché. Le laboratoire français Sanofi va arrêter le développement de son vaccin à ARN messager contre le Covid-19, a-t-il indiqué ce mardi matin. Malgré des résultats intermédiaires positifs pour la phase 1-2 de l’essai clinique, l’entreprise pharmaceutique française juge que ce dernier arriverait trop tard sur le marché, alors que 12 milliards de doses de vaccins anti-Covid auront été produites au total d’ici à la fin de l’année. En août dernier, le président de Sanofi avait appelé les personnes attendant un produit français à faire des injections d’autres vaccins le plus rapidement possible.

Les données initiales de l’essai montraient une séroconversion, c’est-à-dire la fabrication d’anticorps, chez 91% à 100% des participants, deux semaines après la deuxième injection, a indiqué Sanofi dans un communiqué publié mardi. En outre, aucun effet secondaire n’avait été observé et le profil de tolérance était comparable à celui d’autres vaccins Covid-19 à ARN, comme ceux développés par le tandem germano-américain Pfizer-BioNTech et par la biotech américaine Moderna.

En revanche, les résultats de la phase 3 – la dernière avant la mise sur le marché – sur son autre vaccin, fondé sur une protéine recombinante et développé avec le britannique GSK, sont quant à eux toujours attendus avant fin 2021. Il s’agira d’un rappel à injecter à toutes les personnes déjà complètement vaccinées, quel que soit le type de sérum utilisé parmi le trio Moderna, Pfizer-BioNTech et Johnson & Johnson. Sanofi a confirmé une commande de plus de 75 millions de doses de ce rappel par l’Union européenne et le Royaume-Uni, qui devrait s’ajouter à une commande des États-Unis, pour un prix inférieur à 10 euros par dose.

L’arrêt du développement de son vaccin anti-Covid à ARN messager intervient alors que Sanofi travaillait depuis mars 2020 avec Translate Bio sur ce vaccin, et a même racheté début août cette biotech américaine pour quelque 2,7 milliards d’euros. Toutefois, «le besoin n’est pas de créer de nouveaux vaccins Covid-19 à ARN, mais d’équiper la France et l’Europe d’un arsenal de vaccins à ARN messager pour une prochaine pandémie, pour de nouvelles pathologies», a expliqué Thomas Triomphe, le vice-président de la branche vaccins de Sanofi. Par conséquent, Sanofi ne développera pas de phase 3 pour ce vaccin, car «il n’y a pas de besoin de santé publique d’avoir un autre vaccin à ARN messager», poursuit-il.

La grippe dans le viseur

Sanofi dit en revanche vouloir développer des vaccins avec cette technologie contre d’autres virus, sans effet secondaire et avec moins de contraintes au niveau de la température de conservation. Le groupe a déjà lancé de premiers essais pour un vaccin monovalent – avec une seule souche de virus – contre la grippe saisonnière. Il a indiqué ce mardi vouloir lancer l’an prochain des essais cliniques contre la grippe, cette fois-ci avec un vaccin quadrivalent. Le vaccin contre la grippe doit être refait tous les ans pour s’adapter aux souches circulantes. La technologie ARN, rapide à produire, permet une telle adaptation.

D’autres pathologies sont aussi ciblées. «Notre objectif est de libérer le potentiel de l’ARN messager dans d’autres domaines stratégiques, comme l’immunologie, l’oncologie (traitement des cancers, ndlr) et les maladies rares, en plus des vaccins», soulignait il y a quelques semaines Paul Hudson, directeur général de Sanofi. En plus du rachat de Translate Bio, Sanofi avait annoncé en juin qu’il allait consacrer au moins deux milliards d’euros d’ici à 2025 dans la recherche sur de nouveaux vaccins à ARN, des investissements qui devraient se poursuivre au-delà de cette période.

Selon la société d’analyses Global data, les progrès rapides dans le développement de vaccins à ARN devraient en effet «permettre à l’industrie pharmaceutique de continuer à franchir les barrières, et le marché de l’oncologie est celui qui est le plus susceptible d’en bénéficier». La société Moderna a aussi déjà lancé des essais cliniques pour tester un vaccin à ARNm contre le Sida.

Mise à jour après la conférence de presse.