C’est un fléau chez les adolescents. Une proposition de loi visant à interdire la vente aux particuliers de protoxyde d’azote, plus connu sous le nom de «gaz hilarant» ou «proto», a été adoptée ce mercredi 29 janvier au soir en première lecture à l’Assemblée nationale. Le texte a été adopté par 90 voix pour, deux contre et six abstention. Certains des voisins européens de la France, les Pays-Bas et le Royaume-Uni, ont déjà sauté le pas, en 2023, en prohibant la possession de ce gaz incolore dont l’usage détourné peut se révéler dangereux.
«La consommation récréative de ce produit est exponentielle : elle a de plus en plus d’adeptes, notamment chez les jeunes», a alerté en commission la semaine dernière le député de La France insoumise, Idir Boumertit, rapporteur de ce texte cosigné par des députés de plusieurs autres groupes (PS, Ecologistes, Modem…). «Nous faisons face à un problème de santé publique à grande échelle», a-t-il ajouté.
Usage détourné
Vendu sous forme de cartouches, ce gaz est normalement utilisé pour les siphons à crème chantilly. Mais dans son usage détourné, il est prisé pour ses effets euphorisants de courte durée (de l’ordre de quelques minutes). Il est inhalé, le plus souvent via des ballons de baudruche gonflés par ces cartouches ou bonbonnes.
Les risques encourus peuvent être l’asphyxie, la perte de connaissance, des brûlures mais aussi, en cas d’usage répété ou à fortes doses, de sévères troubles neurologiques, hématologiques, psychiatriques et cardiaques, avertit la Mildeca (Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives).
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Une loi de mai 2021 interdit la vente de protoxyde d’azote aux mineurs et sa commercialisation dans les débits de boissons et tabac. Mais il est encore en vente libre dans les supermarchés et sur Internet. L’article premier de cette proposition de loi entend ainsi ne plus réserver cette interdiction aux mineurs, et l’étendre à «l’ensemble des lieux publics et des commerces et en ligne». Un décret devra déterminer les catégories professionnelles autorisées à en acheter par dérogation, et les circuits de distribution.
«Perçue comme légale et peu dangereuse»
Un autre article du texte se concentre lui sur la prévention, en intégrant le protoxyde d’azote aux séances d’informations annuelles prévues dans les collèges et les lycées sur le cannabis. En 2021, 5,5 % des élèves de classe de 3e (âgés environ de 14 ans) disaient avoir déjà consommé du «proto». Les garçons deux fois plus souvent que les filles, selon des données rapportées par l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT).
Toutefois, c’est quelques années après le collège que la consommation de protoxyde d’azote se trouve la plus élevée. Une étude menée par Santé publique France, fin 2023, révélait que 13,7 % des 18-24 ans en ont consommé au moins une fois dans leur vie, et 3,2 % au cours de l’année. «Les jeunes sont particulièrement attirés par cette substance parce qu’elle est très facilement accessible, bon marché, indétectable après consommation et, surtout, perçue comme légale et peu dangereuse», a argumenté Idir Boumertit en commission. Sur Amazon, douze cartouches de protoxyde d’azote sont affichées au prix de 15,29 euros.
Des débats ont également eu lieu dans l’hémicycle concernant la mise en place d’une amende pour la consommation de protoxyde d’azote, réclamée par les députés LR et Renaissance. Des amendements en ce sens ont été rejetés, le rapporteur dénonçant une démarche de «surenchère pénale». La proposition de loi doit désormais être discutée au Sénat, à majorité de droite.
Mise à jour : ce jeudi 30 janvier à 15h31, avec l’ajout de l’adoption de la proposition de loi par les députés, en première lecture.