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Libération
Dysfonctionnements

Gestion de l’IHU de Marseille par Didier Raoult: le gouvernement saisit la justice

La pandémie de Covid-19 en Francedossier
Le rapport des ministères de la Santé et de la Recherche publié ce lundi confirme des «dysfonctionnements graves» au sein de l’institut auparavant dirigé par Didier Raoult, notamment la défense de l’hydroxychloroquine contre le Covid-19.
Didier Raoult avant une conférence de presse le 20 avril à Marseille. (Christophe Simon/AFP)
publié le 5 septembre 2022 à 17h56

Vers un coup de balai massif. Plus de deux ans après les prises de paroles irraisonnées de son directeur de l’époque, Didier Raoult – qui a promu avec force l’hydroxychloroquine, un traitement inefficace contre le Covid –, le gouvernement prend enfin des mesures à l’encontre de l’Institut Hospitalo-universitaire (IHU) de Marseille.

Ce lundi, les ministres de la Santé et de la Recherche annoncent saisir le procureur de la République de Marseille au vu d’un nouveau rapport sur l’IHU de Marseille. Ce rapport administratif définitif, publié lundi, «met en lumière des dysfonctionnements graves de l’IHU», et «plusieurs éléments» sont «susceptibles de constituer des délits ou des manquements graves à la réglementation en matière de santé ou de recherche», déclarent les ministres François Braun et Sylvie Retailleau dans un communiqué commun.

Les deux membres du gouvernement vont aussi convoquer les dirigeants des établissements de tutelle de l’IHU et le nouveau directeur de celui-ci. «Ils leur demanderont de mettre en œuvre dans les meilleurs délais un plan d’actions volontariste tenant compte de l’intégralité des recommandations formulées» dans le rapport, afin d’en finir avec l’ère Raoult. Ils conditionnent la poursuite du financement de l’institut par l’Etat au respect du plan d’actions défini, dans le but d’«assurer l’intégrité médicale et scientifique des pratiques et la pérennité du fonctionnement de l’IHU».

Il s’agit d’une opération de reprise en main de l’institution après le remplacement de son directeur Didier Raoult, arrivé à l’âge de la retraite, par un de ses subordonnés, Pierre-Edouard Fournier. L’IHU a défrayé la chronique durant toute crise sanitaire.

L’IHU au cœur de plusieurs enquêtes

A l’automne 2020, le conseil départemental de l’ordre des médecins des Bouches-du-Rhône avait engagé des poursuites contre Didier Raoult, qui dirige l’Institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection (IHU) à Marseille, lui reprochant notamment plusieurs entorses au code de déontologie liées à la promotion de l’hydroxychloroquine pour lutter contre le Covid-19.

Par ailleurs, des doutes – dont Libération s’était fait l’écho – étaient nés sur les conditions de réalisation de deux études signées par le Pr Raoult, directeur de l’Institut hospitalo-universitaire (IHU) Méditerranée Infection, portant sur l’efficacité de l’hydroxychloroquine pour traiter le Covid-19. L’Institut de Didier Raoult a aussi été sous le feu de critique pour sa politique de tarification de prise en charge de ses patients et pour des soupçons sur la qualité de ses publications scientifiques.

La justice avait, par ailleurs, déjà été saisie par l’Agence du médicament (ANSM), après les révélations de Mediapart, sur la prescription de traitements contre la tuberculose, sans autorisation. La réaction, même tardive, des ministres de tutelle est donc la bienvenue pour finalement clore un épisode peu reluisant pour la recherche clinique française.