«Ce qui nous inquiète, c’est l’absentéisme soignant qui frappe plusieurs de nos établissements», entame Corinne Krencker, directrice du Groupe hospitalier de la région Mulhouse et Sud Alsace (GHRMSA), dans une conférence de presse mercredi. La veille, ce groupe, qui comprend dix établissements dans le Haut-Rhin, a déclenché le plan blanc qui permet de déprogrammer les opérations non urgentes et de solliciter des renforts de personnels.
Encore sous pression à cause de la crise sanitaire, déjà touché par un manque d’effectif, le groupe hospitalier a été contraint de suspendre 174 personnes dans le cadre de l’obligation vaccinale dans les hôpitaux. De quoi accroître la tension hospitalière déjà fortement affectée par le Covid. Au sein de ce groupe de personnels suspendus, une majorité de soignants selon Corinne Krencker. Il y a les non vaccinés qui s’y refusent catégoriquement, ceux qui sont en cours de vaccination ou qui n’ont tout simplement pas fourni leur schéma vaccinal. Et, plus étonnant, des personnes vaccinées, suspendues pour leur opposition à l’obligation.
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Mais il y a aussi des postes rendus vacants par de nombreux arrêts maladies, dont certains font l’objet de contrôles car le groupe soupçonne qu’ils ne soient pas forcément justifiés. «Aujourd’hui, on a quasiment le double d’absentéisme par rapport au mois d’août dernier ce qui est évidemment une interrogation», poursuit Corinne Krencker. C’est ce qui a poussé l’un des services d’urgence à fermer, au moins jusqu’à mardi prochain, et donc à déclencher le plan blanc pour pouvoir continuer d’assurer les soins. D’ici là toutes les urgences vont être concentrées au même endroit, et tous les établissements médicaux du territoire vont se répartir les besoins. «Il faut éviter le recours systématique aux urgences, prévient la directrice à destination de la population. Toujours privilégier le médecin traitant ou appeler le 15 qui pourra réguler les flux de patients.»
«Faute professionnelle»
Si tous les intervenants, directeurs et médecins, soulignent que cette situation complexe est le résultat d’une série de facteurs, on sent chez certain un véritable agacement face au non-respect de l’obligation vaccinale. Le docteur Didier Debieuvre évoque une «faute professionnelle» et un manquement au serment d’Hippocrate pour ce qui est du personnel soignant : «J’ai du mal à comprendre le rationnel qui guide les antivax, les antipass, il y a un amalgame de tout dans ce mouvement.» Le médecin rappelle l’efficacité chiffrée du vaccin sur le nombre d’admissions en réanimation (seules 2% de personnes admises à l’hôpital en raison du Covid ces quatre dernières semaines étaient vaccinées), mais aussi le souvenir traumatique de la première vague, particulièrement violente dans le département.
«Je voudrais rappeler qu’aujourd’hui, il y a un taux de conformité à l’obligation de 94% au sein du personnel», tempère la directrice en saluant le travail de la majorité de ses employés, encore sur le pont, usée par le travail et les heures supplémentaires qui se multiplient. Constat partagé par l’ensemble des intervenants. Le docteur Debieuvre conclue en s’adressant aux journalistes : «Il faut arrêter de focaliser sur cette minorité antivax, qui n’est pas représentative de l’ensemble des soignants, et qui est la plus bruyante. Il faudrait montrer le travail de la majorité silencieuse qui est mis en difficulté.»