21 mois de travail pour «évaluer l’exposition des travailleurs aux agents chimiques dangereux dans le secteur des fleurs». Les ministères du Travail et de l’Agriculture ont chargé l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) d’une première étude pour déterminer dans quelles mesures les fleuristes sont exposés aux pesticides, révèlent la cellule investigation de Radio France et le Monde ce lundi 20 janvier.
«Il s’agit dans un premier temps de comprendre quels sont les risques auxquels sont soumis les professionnels. Dans un second temps, nous devrons identifier les mesures permettant de renforcer leur protection et émettre des recommandations sur des évolutions des différentes réglementations», définit Henri Bastos, directeur scientifique Santé Travail à l’Anses auprès de France Info. La procédure devrait durer environ deux ans.
Décryptage
L’étude, dont l’Anses a été missionnée mi-décembre, n’aurait sans doute jamais existé sans le témoignage de Laure Marivain, une ancienne fleuriste dans les Pays de la Loire dont la fille Emmy est morte à 11 ans d’une leucémie, à cause notamment d’une exposition in utero aux pesticides. Un fait établi par le Fonds d’indemnisation des victimes de pesticides (FIVP). Une première.
Cette évaluation «est un premier pas, mais l’État est au courant du problème depuis longtemps, au moins 2017. Il aurait dû se saisir du sujet il y a plusieurs années déjà et ils n’ont rien fait. Et ça a des conséquences graves. Les fleuristes développent des pathologies graves, et nous, nous avons perdu notre fille», réagit Laure Marivain auprès de France Info. Celle-ci regrette notamment les près de 24 mois que devrait durer l’enquête. «Si on attend que cette expertise soit menée à son terme, il y aura encore des gens qui vont tomber malades. Le système de protection doit être adapté dès aujourd’hui, il aurait dû l’être hier.»
Des fleurs produites à l’étranger dans le viseur
Pour mesurer l’exposition des professionnels du secteur aux pesticides, l’Anses pourrait procéder à des relevés via «des patchs sur la peau» ou «des analyses de sang ou d’urine» ou «des mesures de l’air que les professionnels respirent», explique à France Info Henri Bastos. Une fois la mission terminée, l’Anses devrait formuler des recommandations aux pouvoirs publics, avec de possibles évolutions de la réglementation.
Aujourd’hui, aucune loi n’existe concernant les résidus de pesticides sur les fleurs coupées vendues en France. Près de 85 % d’entre elles sont importées et notamment d’Afrique de l’Est, où des produits interdits en Europe pour leur dangerosité sur la santé sont utilisés pour cultiver les fleurs. Selon le Monde, «l’interdiction d’importer des fleurs cultivées avec des pesticides classés cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction», pourrait ainsi, à terme, être recommandée par l’Anses.