Il avait bien de la gueule, cet enterrement. Il pleuvait pourtant, ce lundi 11 mars, une triste bruine dans le vaste cimetière de Thiais, dans le Val-de-Marne. Et rien ne s’est passé comme prévu. Giovanni aurait dû être enterré dans le carré des indigents, mais son corps était trop imposant. 280 kilos, c’était trop pour l’espace réservé. Auparavant, un de ses derniers souhaits – être incinéré – n’avait pas pu être exaucé ; aucun crématorium en Ile-de-France n’a la place suffisante pour le faire.
Il avait bien de la gueule cet enterrement. Ils étaient une petite centaine à être ainsi venus dans ce bout de banlieue. Visages de tous les jours, paumés comme non paumés, sans domicile fixe comme avec domicile fixe. Des amis, des proches de galères et beaucoup de membres d’associations – en particulier le Carillon, que Giovanni a longuement fréquenté, et la Moquette, qui l’a toujours accompagné. « D’ordinaire, dans le milieu on ne vient pas aux enterrements, dit Cyrille, éducateur à la Moquette. C’est la règle : garder un peu de distance. Mais là, regardez il y a des gens du Samu social, du Recueil social.» Et il ajoute, dans un sourire : «J’aurais sûrement moins de monde à mon enterrement.»
Il avait, oui, de la gueule, cet enterrement. Tous silencieux sous le ciel gris quand est arrivé le camion avec sa grue pivotante pour porter ce cercueil trop lourd pour les bras des humains. Tous graves, fixant le bras de cette grue qui se déplace, porte, puis pose dans un v