Il était le premier patient vivant à être greffé d’un rein de porc génétiquement modifié. Richard Slayman, 62 ans, est mort un mois et demi plus tard, a annoncé le Massachusetts General Hospital samedi 11 mai. «Mass General est profondément attristé par le décès soudain de M. Rick Slayman. Nous n’avons aucune indication qu’il s’agisse d’une conséquence de sa récente transplantation», a souligné l’établissement situé à Boston, aux Etats-Unis.
Ce sont les chirurgiens de ce même hôpital qui avaient réalisé cette première mondiale, après quatre heures d’opération en mars. Leur patient souffrait d’une maladie rénale en phase terminale, ainsi que de diabète et d’hypertension artérielle. Il avait déjà reçu un rein d’un donneur humain mort en 2018, mais sa dégradation cinq ans après la transplantation l’avait contraint à reprendre les dialyses. «Slayman sera à jamais considéré comme une lueur d’espoir pour d’innombrables patients transplantés dans le monde entier et nous lui sommes profondément reconnaissants de sa confiance et de sa volonté de faire progresser le domaine de la xénotransplantation», insiste l’établissement de santé.
Gènes modifiés pour limiter le rejet
Le rein de porc utilisé pour la transplantation a été fourni par une société de biotechnologie du Massachusetts, eGenesis. Il avait été génétiquement modifié à l’aide de la technologie Crispr-Cas9. Objectif : éliminer les gènes porcins nocifs et ajouter certains gènes humains pour améliorer la compatibilité de l’organe avec le corps humain. Et donc réduire le risque de rejet. Jusqu’à présent, des reins de porc génétiquement modifiés avaient été greffés sur des personnes en état de mort cérébrale – l’un d’eux avait même fonctionné pendant 32 jours consécutifs. Deux patients vivants ont reçu des cœurs de porc eux aussi modifiés, en 2022 et 2023, mais sont morts peu après.
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Cette première transplantation d’un rein porcin n’en reste pas moins prometteuse. Les xénogreffes – greffes d’organe animal vers l’humain – pourraient représenter une alternative à la greffe classique d’organes humains. Et pour cause : les établissements hospitaliers doivent composer avec un manque chronique de dons d’organes, et les patients attendre toujours plus longtemps. Le Massachusetts General Hospital affirmait par exemple en mars qu’il avait plus de 1 400 malades en attente d’une greffe de rein. La situation est tout aussi préoccupante en France : l’année dernière, selon l’Agence de biomédecine, plus de 20 000 personnes attendaient une greffe, mais seulement un peu plus de 5 000 ont pu en bénéficier. 500 meurent chaque année faute d’en avoir eu une, et le taux de refus de dons stagne à 30 % depuis vingt-cinq ans.
Il reste, toutefois, de nombreuses étapes à franchir avant que les xénotransplantations se normalisent. Les scientifiques doivent encore mieux cerner les mécanismes de rejet, limiter le risque infectieux. Sans compter les nombreuses questions éthiques qui se posent encore.