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Justice

Grossesse : une prestataire d’échographies «de plaisir» condamnée à une amende avec sursis

L’ordre des sages-femmes salue la condamnation ce lundi 2 juin de la pratique à des échographies sans raison médicale, loin d’être bénéfique pour le fœtus, et espère que la décision fera jurisprudence.
(Amelie-Benoist/ Image Point FRR/BSIP via AFP)
publié le 2 juin 2025 à 19h01

Une imagerie qui se réserve comme une table au restaurant. Le tribunal de Dunkerque a condamné ce lundi 2 juin une entrepreneuse à une amende avec sursis pour des «échographies de plaisir», une prestation commerciale proposée aux femmes enceintes hors cadre médical. Cette quadragénaire a été reconnue coupable d’exercice illégal des professions de médecin et de sage-femme, et condamnée à une amende de 3 500 euros, assortie d’un sursis simple. Le 28 avril, le parquet avait requis à son encontre une interdiction d’exercer et 5 000 euros d’amende avec sursis.

Cette manipulatrice en radiologie de formation avait ouvert son entreprise dans le Nord en 2023. Sa société proposait aux femmes enceintes des échographies dites «de plaisir» : des examens en 3D permettant de visualiser le visage du fœtus, en complément de ceux réalisés dans le cadre du suivi médical classique d’une grossesse. La semaine dernière, l’entrepreneuse avait déclaré avoir cessé son activité depuis sa mise en cause et être en reconversion. Elle avait aussi déploré faire l’objet de menaces sur Internet.

Son avocat, Me Fabien Chirola, avait plaidé la relaxe, en faisant valoir que sa cliente n’avait pas eu l’intention de commettre quelque chose d’illégal. Me Chirola a estimé ce lundi «avoir été entendu par le tribunal», la peine prononcée constituant selon lui «une relaxe qui n’a pas été assumée». Il a toutefois regretté que sa cliente fasse les frais «d’une forme de flou juridique».

«Ces cabinets ont pignon sur rue»

Le Conseil national de l’ordre des sages-femmes, qui s’inquiète de l’augmentation ces dernières années de ce type d’échographies de convenance, s’est réjoui de la tenue de ce premier procès et de cette condamnation. «Cette commerçante n’est pas la seule à exercer en France, ces cabinets ont pignon sur rue dans beaucoup de départements français», a réagi sa présidente, Isabelle Derrendinger. L’ordre a par ailleurs déjà fait plusieurs signalements, notamment aux agences régionales de santé (ARS). Dans le Nord, son antenne départementale a remonté aux parquets deux autres cas.

Des études de la Haute Autorité de santé (HAS) comme de nombreuses sociétés savantes en France montrent que le recours à des échographies avec des ultrasons à haute fréquence «n’est pas bénéfique pour le fœtus» quand il est pratiqué de manière excessive ou sans raison, a souligné ce lundi la présidente du conseil départemental de l’ordre des sages-femmes du Nord, Anaïs Huguet. Elle a dit espérer que cette décision fasse jurisprudence et «qu’on puisse fermer l’ensemble de ces cabinets».

En 2012, la HAS estimait dans un rapport qu’effectuer des échographies fœtales commerciales, sans motif médical, était contraire aux codes de déontologie des médecins et des sages-femmes qui leur interdisent de pratiquer la médecine comme un commerce. Un arrêté ministériel d’avril 2018 a précisé que «seuls les médecins et les sages-femmes réalisent […] des échographies obstétricales et fœtales».