D’instinct, la mère a passé son bras autour des épaules de sa fille. Depuis que Sophia, 11 ans, l’a rejointe sur le canapé, les traits de Katia se sont apaisés. De l’angoisse qui quelques minutes plus tôt brouillait le regard et la voix, il n’y a plus trace. A la gamine masquée et cheveux ras qui l’observe à la dérobée, Katia offre un sourire que l’on devine constant. La mère balaye du regard le salon tout en parquet et meubles finlandais colorés de la Maison des parents, jumelée à l’hôpital pédiatrique Robert-Debré. C’est là que les deux Ukrainiennes ont trouvé refuge le 19 mars à leur arrivée à Paris, guidées par le hasard et l’espoir. «Elles avaient une valise de cabine pour tout bagage mais elles semblaient soulagées», se souvient Franck Perez, directeur de l’établissement.
Le calme de la pièce atténue le vacarme des souvenirs. Katia vient de recevoir des nouvelles rassurantes de ses proches restés en Ukraine. Elle dit, presque joyeuse : «Cela redevient normal.» A cet instant, peu importe à la trentenaire d’avoir «tout perdu avec la guerre», de n’être «plus personne». Elle a atteint son but. Depuis que le service d’hématologie pédiatrique du professeur Jean-Hugues Dalle a pris sa fille en charge, l’enfer appartient au passé : «L’essentiel, c’est de terminer le traitement de Sophia.»
«Dix enfants sous chimio, bloqués à l’hôpital»
Le 24 février, quand les Russes commencent à bombarder Kherson, ville ukrainienne proche de la mer Noire, la vie de Katia bascule pour la deuxième fois. La pr