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Double peine

Indemnisation des maladies professionnelles : la Cour des comptes dénonce un système décourageant pour les patients

L’institution de la rue Montpensier constate, dans un rapport publié vendredi 3 octobre, un phénomène de sous-déclaration massif, dû à des procédures administratives trop complexes qui privent les salariés de leurs droits.

Plus de 85 000 maladies professionnelles ont été reconnues en 2023, un chiffre sous-estimé selon la Cour des comptes. (Caroline Paux/Hans Lucas. AFP)
Publié le 03/10/2025 à 16h34

Questionnaires à remplir en double, innombrables documents à envoyer en papier... Trop complexes et peu lisibles, les procédures d’indemnisation des maladies professionnelles sont décourageantes pour les patients, estime la Cour des comptes dans un rapport publié vendredi 3 octobre.

Des pathologies «largement sous-estimées»

L’Assurance maladie prévoit des indemnisations particulières pour les personnes atteintes d’une pathologie à cause de leur travail : dans certains cas, elles peuvent même donner lieu à des versements à vie. En 2023, plus de 85 000 maladies professionnelles ont ainsi été reconnues ; mais la Cour des comptes souligne qu’elles restent largement sous-estimées.

La grande majorité des remboursements concerne des troubles musculo-squelettiques : des affections qui touchent les articulations, les muscles et les tendons, comme la lombalgie ou le syndrome du canal carpien. Dues au port de charges lourdes, aux postures contraignantes ou aux gestes répétitifs, elles touchent une grande variété de professions, des métiers du bâtiment à ceux du soin à la personne. Les affections psychosociales telles que le burn-out sont également de plus en plus fréquentes et concerne toutes les professions.

«La complexité du dispositif de reconnaissance des maladies professionnelles et les contraintes liées aux procédures n’en facilitent pas l’appropriation par les médecins et peuvent décourager de nombreuses victimes», déplore la Cour dans son rapport.

Des disparités régionales flagrantes

La mise en œuvre d’un dossier reste décourageante, dénonce l’institution, pointant par exemple la nécessité de réunir de nombreux documents sans possibilité de le faire numériquement.

Pour qu’une pathologie soit reconnue comme maladie professionnelle, elle doit être inscrite dans le tableau les répertoriant ; on en compte aujourd’hui 183, recensés sur le site de l’Institut national de recherche et de sécurité. Malgré ce chiffre d’apparence élevé, le tableau demeure incomplet ; les troubles psychosociaux, par exemple, n’y apparaissent pas. Une pathologie peut également être reconnue par un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. Mais cette procédure est «saturée», regrette la Cour des comptes, notant que le délai moyen de traitement y est de plus de six mois.

La Cour s’étonne en outre de grandes disparités régionales quant au sort fait à ces dossiers : ainsi, moins d’un cinquième des dossiers complémentaires sont approuvés en Bourgogne-Franche-Comté, contre plus de deux tiers en Bretagne. Elle recommande une simplification et une dématérialisation des formulaires de déclaration des maladies professionnelles, «afin que les dossiers puissent être traités dans un temps acceptable pour les victimes».