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Ethique

Le successeur de Didier Raoult suspend les essais cliniques à l’IHU Méditerranée

La pandémie de Covid-19 en Francedossier
Pierre-Edouard Fournier, qui a pris la direction de l’IHU Méditerranée Infection à la fin août, annonce la suspension des essais cliniques de l’établissement après le rapport à charge des inspections sur sa gestion et ses possibles manquements à l’éthique.
L'Institut Hospitalo-Universitaire Méditerranée Infection (IHU) à Marseille est dans l'œil de la justice pour de possibles manquements à l'éthique d'essais cliniques. (Julien Poupart/Abaca)
publié le 7 septembre 2022 à 16h13

Tous les essais cliniques sont suspendus à l’IHU Méditerranée Infection. C’est la décision prise par son nouveau directeur, Pierre-Edouard Fournier, qui vient de succéder à Didier Raoult, alors que l’établissement est sous l’œil des ministres de la Santé, de la Recherche et de la justice. «Je me suis assuré que tous les essais cliniques en cours relevant de la recherche impliquant la personne humaine (RIPH) soient suspendus, dans l’attente de la régularisation de la situation», affirme Pierre-Edouard Fournier.

Le professeur Fournier, spécialiste des maladies infectieuses et dont la nomination avait suscité des réserves car il a lui-même longtemps travaillé sous l’égide de Didier Raoult, a pris ses fonctions en pleine tempête médiatique autour de l’institut. Dans cette première prise de parole officielle, il a opté pour un ton conciliant qui tranche avec celui de son prédécesseur, assurant par exemple que ses premières réunions avec les hôpitaux marseillais (AP-HM) «ont permis de poser les bases de relations constructives et apaisées».

«Graves manquements à la réglementation des recherches impliquant la personne humaine»

Il se dit également «heureux» de rencontrer prochainement les ministres de la Santé et de la Recherche pour leur présenter son «plan d’action ambitieux» qui «mettra en œuvre les recommandations» du rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) et son homologue pour l’enseignement supérieur et la recherche (IGESR) publié lundi. Ce document a souligné les dérives médicales, scientifiques et de management au sein de l’IHU sous la direction de Didier Raoult, dont plusieurs pouvant «relever d’une qualification pénale». Les ministres de la Recherche et de la Santé, Sylvie Retailleau et François Braun, avaient annoncé dans la foulée saisir la justice.

Le parquet de Marseille a lui annoncé avoir déjà ouvert en juillet une information judiciaire, après un autre rapport cinglant de l’Agence du médicament (ANSM), pour «faux en écriture», «usage de faux en écriture» et «recherche interventionnelle impliquant une personne humaine non justifiée par sa prise en charge habituelle». Dans les conclusions de son enquête en avril, l’ANSM accusait l’IHU «de graves manquements et non-conformités à la réglementation des recherches impliquant la personne humaine».

Retraité depuis l’été 2021 de son poste de professeur d’université-praticien hospitalier, Didier Raoult a été remplacé fin août à la tête de l’IHU Méditerranée. Il avait acquis une importante célébrité médiatique en tenant des positions, aujourd’hui discréditées, sur le Covid-19, notamment l’efficacité supposée de traitements comme l’hydroxychloroquine. Dans sa réponse à l’Igas et l’IGESR, Didier Raoult a déploré «une absence de distance de (leur) mission qui s’apparente plus à une mission commando qu’à une inspection au service de l’Etat français.»