Une augmentation inédite depuis des années. Les complémentaires santé à statut mutualiste prévoient une hausse moyenne de 8,1 % de leurs cotisations en 2024, selon une enquête de la Mutualité française, fédération des mutuelles de l’Hexagone, parue ce mardi 19 décembre. Un bond exceptionnel pour les adhérents qui avaient déjà vu leur cotisation augmenter de 2,6 % en 2021, 3,4 % en 2022 et 4,7 % en 2023.
Cette enquête, portant sur 38 mutuelles qui protègent 18,7 millions de personnes au total, prévoit une hausse de 7,3 % en moyenne pour les contrats individuels et de 9,9 % en moyenne pour les contrats collectifs obligatoires (souscrits par les entreprises pour leurs salariés), selon les chiffres de la Mutualité. «En individuel, pour la moitié des contrats, la hausse est inférieure à 6,5 %, cherche à tempérer Eric Chenut, président de la Mutualité française, auprès du Parisien. Et individuel et collectif confondus, la médiane est à 6,9 %.»
Pas de déficit pour les mutuelles
«Les dépenses de santé ont été extrêmement dynamiques en 2023, justifie le président de la Mutualité française. La hausse a été de 6 % alors qu’on s’attendait plutôt à 3 ou 4 %.» Cette hausse de dépenses de mutuelle est, pour les assureurs privés, alimentée par la revalorisation annoncée des salaires et tarifs des soignants pour 2024 (de 25 à 26,50 euros voire à 30 euros en fonction des négociations entre médecins et Sécu), par une plus forte consommation de soins ou encore par la diminution du remboursement des soins dentaires par la Caisse primaire d’assurance maladie (de 70 % du tarif à 60 %).
Si le montant de la prise en charge par la Sécu diminue, il reste deux solutions pour payer les praticiens. Soit c’est le reste à charge qui augmente, soit c’est la part mutuelle. Le déficit de ces boîtes privées ne leur étant pas envisageable, elles font mécaniquement monter les prix : «Les mutuelles ne peuvent générer des déficits continus et elles ne le souhaitent pas !» martèle Eric Chenut dans son communiqué. De façon plus structurelle, «les dépenses de santé augmentent plus vite que la richesse produite depuis des années, souligne le président de la fédération. Il faut rattraper l’écart».
«Inacceptable» pour Aurélien Rousseau
Selon le président de la Mutualité, l’une des solutions pour tenter d’éviter des hausses de cotisations trop fortes pourrait être de revoir le panier de soins de référence, le «contrat responsable et solidaire». Ce contrat «embarque un très haut niveau de définition des couvertures et aussi un très haut niveau de coûts», dit-il. Il serait peut-être utile de lui «donner une modularité plus grande» pour «permettre aux gens de se couvrir au niveau qui leur est nécessaire». En clair : moins de protection pour les plus pauvres.
Le gouvernement s’inquiète depuis plusieurs semaines des hausses de cotisations annoncées par les complémentaires santé pour 2024 et du risque d’impact sur le pouvoir d’achat. Le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, avait mis en garde vendredi en reconnaissant que si l’on pouvait «expliquer» des hausses «de 5 à 7 %», d’autres augmentations déjà annoncées et allant jusqu’à 12 %, étaient «inacceptables». Pour autant, le gouvernement reste impuissant face au bond du prix des complémentaires car il ne peut pas encadrer leurs tarifs. Seule possibilité alors : appeler les consommateurs et les entreprises à faire jouer la concurrence pour faire baisser les prix. Et donc faire confiance au marché pour un sujet aussi vital que celui la santé.