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Covid-19

Nouvelle-Calédonie : reconfinée mais apaisée

La pandémie de Covid-19 en Francedossier
Après la détection de 9 cas de Covid, le territoire qui vivait depuis un an sans restriction sanitaire va être totalement confiné à partir de ce lundi. Une mesure qui intervient sur fond d’instabilité de l’exécutif malgré l’accord historique trouvé sur la mine de nickel.
Au lycée Lapérouse, à Nouméa, en avril 2020. (Théo Rouby/AFP)
publié le 7 mars 2021 à 17h41

Après un an sans transmission du Covid-19 sur son sol, la Nouvelle-Calédonie va se reconfiner en urgence dès demain, à la suite de la découverte d’une chaîne de contagion locale. Le territoire était parvenu à empêcher la circulation du virus au prix d’un confinement de quatre semaines en mars 2020 et vivait normalement depuis, sans masques, ni mesures de distanciation.

Cependant, samedi, alors même que le cyclone Niran fouettait l’île de rafales à plus de 200 km/h, neuf personnes ont été testées positives au Covid-19, dont quatre membres d’une même famille, rentrés il y a huit jours d’un voyage à Wallis-et-Futuna. Il semble que le virus ait d’abord trouvé la faille dans les mesures de protection de cette collectivité d’outre-mer située à 16 000 kilomètres de la métropole, considérée jusqu’ici comme Covid free et bénéficiant à ce titre d’une «bulle» de voyage avec la Calédonie voisine.

«Mesures strictes»

On a appris ce dimanche qu’un homme se trouve dans un état critique à Wallis après avoir probablement contracté le virus en métropole fin janvier, et six autres cas ont été détectés dans l’archipel. En conséquence, à Nouméa où commencent les travaux de réparation des gros dégâts matériels infligés par Niran, le haut-commissaire de la République Laurent Prévost et le membre du gouvernement Thierry Santa ont annoncé conjointement ce dimanche que la Nouvelle-Calédonie serait reconfinée à partir de lundi à minuit, pour une durée de deux semaines. Les modalités de ce nouveau confinement n’ont pas encore été précisées, mais le haut-commissaire a indiqué qu’il s’agira de «mesures strictes», avec fermeture des restaurants, des bars et des commerces non essentiels, et avec attestations de sortie de rigueur. Les écoles ne rouvriront pas ce lundi.

La nouvelle intervient dans un contexte politique compliqué. Début février, l’ancien gouvernement a été dissous à la suite de la démission des membres indépendantistes. Et le nouveau gouvernement collégial à majorité indépendantiste – qui détient la prérogative de la santé – ne parvient pas à se donner un chef. Trois candidats désignés par les principales formations politiques sont en lice, le loyaliste Thierry Santa et deux indépendantistes, l’ex-président du Medef NC Samuel Hnepeune (UC - FLNKS) et Louis Mapou (UNI – FLNKS). Comme le veut la loi organique, le président de l’exécutif local doit être désigné à la majorité absolue par les onze membres du gouvernement. Or deux votes successifs ces dernières semaines n’ont pas permis de départager Mapou et Hnepeune, qui ont recueilli chaque fois trois voix chacun, Santa plafonnant à quatre. Le blocage est révélateur des divergences au sein du camp kanak, entre les partisans de la priorité à l’économie représentés par Hnepeune, et les indépendantistes «historiques», rangés derrière Mapou. A moins que Thierry Santa obtienne deux voix supplémentaires en sa faveur, ce qui semble très improbable malgré sa gestion sans faute de la crise du Covid lorsqu’il était à la tête du précédent gouvernement, il faudra qu’un des deux candidats Kanak se désiste en faveur de l’autre pour que le gouvernement puisse siéger.

Bonne nouvelle

L’urgence est d’autant plus grande que le territoire doit voter son budget le 31 mars au plus tard, sous peine d’être placé sous tutelle par l’Etat. Une bonne nouvelle malgré tout dans ce tableau préoccupant : le conflit très dur autour du rachat de l’usine de nickel du Sud, qui menaçait ces mois passés d’entraîner le pays dans une spirale de violence, s’est résolu en fin de semaine avec un accord politique qualifié d’«historique» par ses signataires loyalistes et indépendantistes. Construit en partenariat avec Elon Musk le patron de Tesla intéressé par le nickel calédonien pour la fabrication de ses batteries, l’accord permet à la collectivité locale de redevenir propriétaire du fabuleux gisement de métal de Goro, qui sera loué au consortium majoritairement calédonien acquéreur de l’usine. «Au-delà d’une simple sortie de crise, cet accord politique donne naissance à un nouveau modèle minier du sud calédonien», s’est félicité Roch Wamytan, le président indépendantiste du Congrès de la Nouvelle-Calédonie.