Plus de trois ans de discussions pour un «accord de principe» trouvé ce samedi 12 avril. Les délégués des Etats membres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont annoncé être tombés d’accord sur un texte qui doit permettre de mieux protéger le monde de futures pandémies, selon la coprésidente de l’organe de négociation et ambassadrice de France pour la santé mondiale.
«On a un accord de principe et on met en réserve l’accord définitif des capitales», a expliqué Anne-Claire Amprou, tout en précisant que les délégués se retrouveront mardi 15 avril à Genève pour toiletter le texte et donner leur accord définitif. Il devra encore être adopté lors de l’Assemblée mondiale de la santé, qui se tient en mai à Genève, par tous les pays membres de l’Organisation mondiale de la santé.
Après une séance de négociations marathon de quasi vingt-quatre heures, les délégués ont applaudi à tout rompre ce samedi et ont passé de longues minutes à se congratuler. «C’est un très bon signal. Vous faites partie d’une histoire incroyable en train de se faire», a déclaré le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, resté dans la salle avec les délégués toute la nuit.
Le transfert de technologies au cœur des discussions
L’un des principaux points de contestation vendredi a été le paragraphe 11 de ce texte d’une trentaine de pages, qui définit le transfert de technologies pour la production de produits de santé liés aux pandémies, en particulier au profit des pays en développement. Le sujet avait été au cœur des griefs des pays les plus démunis lors de la pandémie de Covid-19, quand ils voyaient les pays riches s’approprier les doses de vaccin et autres tests.
Plusieurs pays où l’industrie pharmaceutique pèse lourd dans l’économie sont opposés à l’idée d’obligation de transfert et insistaient sur son caractère volontaire. Au contraire des pays d’Amérique latine, qui poussent pour que ce transfert soit facilité. Selon un délégué, ce point a été réglé mais la dernière version du texte n’était pas encore disponible ce samedi matin.
Anne-Claire Amprou relate : «Nous avons eu à négocier cette semaine avec l’ensemble des Etats membres dans une approche très constructive et très positive, c’est une vraie volonté d’aboutir pour avoir un accord qui fasse vraiment la différence et qui permet de prévenir, de préparer, de répondre aux pandémies.» Seule l’expérience dira s’il survit à l’épreuve du feu : une prochaine pandémie dont Tedros Adhanom Ghebreyesus rappelle qu’il ne s’agit pas de savoir «si elle aura lieu mais quand».
Les Etats-Unis absents
Ce texte est adopté dans un contexte de grave crise du multilatéralisme et du système de santé mondial provoqué par la coupe brutale de l’aide internationale américaine décidée par Donald Trump, alors que les Etats-Unis étaient de très loin le principal donateur humanitaire. Ils étaient aussi le grand absent de ces négociations, le président Trump ayant annoncé dès son retour à la Maison Blanche que le pays quittait l’organisation. Un retrait qui fait peser des risques sur le système de surveillance internationale des risques sanitaires, selon les experts.
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En décembre 2021, deux ans après le début de la pandémie de Covid-19 qui a fait des millions de morts et mis l’économie mondiale à genoux, les pays membres de l’OMS avaient décidé de doter le monde d’un texte devant permettre de prévenir et de mieux gérer les pandémies. Le document de ce samedi a perdu du lustre par rapport aux ambitions de départ, explique James Packard Love, le directeur exécutif de l’ONG Knowledge Ecology international, qui suit les négociations depuis le début : «Les propositions initiales présentées par le secrétariat étaient assez ambitieuses. Ce n’est plus le cas maintenant car les négociations ont traîné» et les représentants des diverses industries s’en sont mêlés.
Epidémie
La grippe aviaire H5N1, dont le virus ne cesse d’infecter de nouvelles espèces, faisant craindre que la transmission entre humains ne soit qu’une question de temps, les flambées de rougeole dans 58 pays faute de taux de vaccination suffisant à cause de la méfiance envers les vaccins suscitée par la désinformation, ou encore le mpox qui fait des ravages en Afrique, sont autant d’avertissements sur la nécessité de trouver un accord et de se coordonner à l’échelle internationale.