En dépit des nombreuses alertes des pouvoirs publics, les intoxications au protoxyde d’azote ou «gaz hilarant» continuent à progresser en France, affirment ce mercredi 16 avril les autorités sanitaires. Ces dernières ont noté pour la première fois des conséquences sur des nouveau-nés à cause d’une consommation par leur mère pendant la grossesse.
«Depuis 2020, les signalements d’intoxications liées à l’usage détourné du protoxyde d’azote, ou ‘‘proto’’, sont en hausse continue», constatent dans un communiqué l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), Santé publique France et l’Agence de sécurité sanitaire (Anses). Surtout, le phénomène prend de l’ampleur selon les derniers chiffres - datant de 2023 - publiés ce mercredi par ces organismes. Ils se basent sur les données de deux types d’organismes différents : les centres d’évaluation et d’information sur la pharmacodépendance-addictovigilance (CEIP-A) ; et les centres antipoison et de toxicovigilance (CAP-TV). Les premiers ont observé 472 signalements en 2023 et les seconds 305, soit des hausses respectives de 30 % et de 20 % par rapport à l’année précédente.
Enquête
Ces chiffres ne concernent toutefois que les intoxications recensées, et ne donnent donc qu’une vision limitée de l’ampleur de la consommation générale de protoxyde d’azote, qui pourrait être bien supérieure. Reste que des des tendances notables émergent : «Nous notons que la part des signalements concernant des femmes augmente», remarquent les agences.
Elles mentionnent aussi une nouveauté : pour la première fois, deux cas concernant des nouveau-nés ont été recensés à la suite de l’usage de protoxyde d’azote par leurs mères pendant la grossesse. «Nous alertons particulièrement les femmes enceintes et en âge de procréer sur les risques potentiellement graves pour l’enfant à naître», insistent les autorités.
Une substance populaire chez les jeunes, bien qu’interdite
Ce gaz sert normalement en cuisine, par exemple dans les siphons à chantilly. Mais il fait l’objet d’un usage récréatif, en particulier chez les adolescents et jeunes adultes, dont les conséquences neurologiques peuvent être graves et durables. Les jeunes majeurs sont les principaux consommateurs de protoxyde d’azote. 13,7 % des 18-24 ans en ont consommé au moins une fois dans leur vie, contre 2 % a parmi les 35-44 ans et 0,8 % chez les 65-75 ans, selon une étude publiée ce par Santé publique France en octobre 2023.
Sa popularité est croissante et les autorités sanitaires s’en étaient déjà inquiétées voici deux ans. Les parlementaires étudient actuellement des mesures de restriction sur ce gaz, dont la vente est déjà interdite aux mineurs. Les sénateurs ont voté en mars la pénalisation de l’usage détourné de protoxyde d’azote, sans aller toutefois jusqu’à interdire totalement sa vente aux particuliers comme l’avaient fait auparavant les députés. L’avenir de cette loi dépendra des négociations entre les deux chambres.