C’est un constat qui s’affirme, cinq ans après la crise du COVID-19. Comme nombre d’études sanitaires l’ont déjà documenté, adolescents et jeunes adultes français sont nombreux à connaître des troubles mentaux. Ils seraient 1 sur 4 (25 %) à se déclarer dépressifs, selon un sondage mené par la Mutualité Française, l’Institut Montaigne, et l’Institut Terram. L’organisme de protection sociale et les deux think thank révèlent ce mardi les résultats d’une enquête conduite au printemps 2025, sur un échantillon de 6 533 jeunes, âgés de 15 à 29 ans.
Les participants, censés représenter la population française, ont répondu à un formulaire de 23 questions, ainsi qu’à une auto-évaluation, nommée la PHQ-9, utilisée comme référentiel international en psychiatrie. Ces résultats pointent aussi les limites des réponses publiques aux problèmes de santé mentale.
Reportage
Selon l’autoévaluation, un jeune sur quatre s’estime donc en dépression (25 %). 14 % se déclarent en mauvaise santé mentale contre 64 % se disant aller bien. Plus de huit sur dix affirment aussi s’être sentis fatigués ou manquer d’énergie dans les deux dernières semaines. Six sur dix se disent tristes, déprimés ou désespérés, et près d’un sur trois affirme avoir déjà eu des pensées suicidaires ou envisagé de se faire du mal.
Un faible recours aux professionnels de santé
Alors que la «santé mentale» a été désignée «grande cause nationale» pour l’année 2025, l’étude met en lumière les limites des réponses publiques, pointant des «dispositifs fragmentés», «peu lisibles», et «difficilement accessibles». Ainsi, seuls 38 % des jeunes interrogés ont déjà parlé de leur santé mentale avec un professionnel de santé, tandis qu’ils sont 19 % à avoir ressenti le besoin de consulter sans franchir le pas. Parmi les raisons évoquées, la peur du jugement apparaît en tête de liste, suivie du coût, et de «l’impression que cela ne va pas les aider».
Dans les départements d’outre-mer, où les indicateurs de souffrance psychique sont les plus préoccupants, le recours aux soins est encore plus limité : 30 % seulement des jeunes ont consulté un professionnel.
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Un chiffre d’autant plus préoccupant, qu’à l’échelle territoriale, la proportion de jeunes ultramarins qui se disent atteints de dépression est supérieure (39 %) à la moyenne du reste de la France (25 %). Ce taux grimpe même à 52 % en Guyane et à 44 % en Martinique, contre 19 % en Bourgogne-Franche-Comté et 28 % en Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Les résultats de l’enquête se font aussi le relais de disparités sociales. Comme le montrent d’autres études sur le sujet, les jeunes femmes apparaissent plus touchées : 27 % souffriraient de dépression, contre 22 % des jeunes hommes.
L’enjeu de la sensibilisation
«Si les proches et les initiatives de l’établissement scolaire ou universitaire jouent encore un rôle important, les réseaux sociaux sont aujourd’hui leur canal d’information privilégié», rapporte l’enquête. A l’heure où 76 % des jeunes interrogés déclarent avoir été sensibilisés à la santé mentale, «l’accès à une information fiable, encadrée, et de qualité reste crucial pour prévenir les troubles et accompagner les jeunes», rappellent les porteurs de l’étude.
Le gouvernement a dévoilé en juin un plan pour mieux repérer et soigner les troubles psychiques, intitulé «Ne plus laisser la souffrance psychique sans réponse». Cette initiative, qui doit notamment rendre «plus attractive la psychiatrie publique», n’a pas convaincu les soignants, qui ont regretté des mesures insuffisantes et un flou sur les moyens financiers. Selon le ministère de la Santé, qui fait de la «détection précoce des troubles psychiques» chez les jeunes, notamment à l’école, l’un de ses axes principaux, 100 % des professionnels de santé éducatifs devraient être formés en santé mentale d’ici la fin 2025. Il faudra attendre la rentrée 2026 pour qu’un kit «prévention et sensibilisation» soit diffusé à toute la communauté éducative, tandis que plus de 300 000 «secouristes en santé mentale» devraient être formés d’ici l’horizon 2027.