Chaque jour, la liste de victimes potentielles d’une levure de riz rouge s’allonge. L’ombre d’un scandale sanitaire flotte sur le Japon depuis le début de semaine. En cause : des compléments alimentaires vendus comme anticholestérol, à base de beni koji, une levure de riz rouge. Cinq morts ont été identifiés et 114 personnes ont été hospitalisées, a précisé vendredi 29 mars le groupe pharmaceutique japonais Kobayashi Pharmaceutical. Il investigue sur le lien entre ces cas rapportés jour après jour avec trois de ses produits. Les autorités sanitaires japonaises ont elles-mêmes lancé une enquête.
«Je m’excuse profondément pour la grande anxiété que nous avons causée» : devant les caméras, le président du groupe, Akhiro Koyobashi, et d’autres dirigeants de la société se sont inclinés, signe de contrition. En fin de semaine dernière, décision avait été prise de rappeler trois de ses produits : des plaintes de clients, souffrant de problèmes rénaux, les avaient alertés. Sauf que le premier signalement remonte au 15 janvier. Akihiro Kobayashi assure «regretter» de ne pas avoir communiqué plus tôt. Le groupe affirme vouloir indemniser les personnes atteintes d’effets secondaires ou étant hospitalisées après avoir consommé ses compléments.
Risques au foie
Le beni koji est réputé comme étant anticholestérol naturel, mais des risques lui sont aussi associés : en 2019, par exemple, un article du British Medical Journal alertait sur ses dangers potentiels, en particulier au niveau du foie et des reins. La Commission européenne a ainsi introduit en 2022 une réglementation pour limiter l’utilisation d’une substance contenue dans les compléments à base de riz rouge (la monacoline) à cause d’effets indésirables. Les autorités sanitaires japonaises n’incriminent pas directement le beni koji : elles et l’entreprise s’échinent encore à identifier quelle substance précise dans l’ingrédient a pu causer ces hospitalisations et morts. «Après analyse, nous avons constaté qu’il était possible que les matières premières utilisées pour fabriquer le beni-koji contiennent des ingrédients que notre société n’avait pas l’intention d’inclure», a souligné le groupe lundi. Avant d’affirmer ce vendredi qu’un composé chimique naturellement produit par la moisissure, de l’acide pubérulique, pourrait être en cause, rapporte le JapanTimes.
«Une fois que la cause sera identifiée, le gouvernement examinera les mesures nécessaires» à prendre pour éviter qu’une telle affaire ne se reproduise, a promis plus tôt dans la semaine le Premier ministre Fumio Kishida devant le Parlement. Son ministre de la Santé a informé d’une coopération «avec la ville d’Osaka pour enquêter sur la cause [de l’affaire, ndlr] et prévenir d’autres dommages sanitaires». Il a également «demandé aux autorités locales de tout le pays de collecter des informations sur les dommages sanitaires».
Produits alimentaires dérivés
Au Japon, cette levure «ancestrale» est très répandue et utilisée dans des milliers de produits. Ceux vendus par Kobayashi Pharmaceutical ne sont pas les seuls concernés : il a fourni l’ingrédient à 50 autres entreprises au Japon, et deux à Taïwan. Beaucoup ont ainsi annoncé des rappels de produits dérivés, dont alimentaires comme de l’assaisonnement pour salade, du saké pétillant ou de la pâte «miso».
Jeudi, les médias taïwanais, cités par le JapanTimes ont rapporté l’hospitalisation d’une femme de 70 ans, qui prenait un supplément fabriqué par une société taïwanaise utilisant de la levure tout droit venue des usines de Kobayashi Pharmaceutical. Une insuffisance rénale aiguë lui a été diagnostiquée. Si le lien est confirmé, il s’agirait du premier cas d’hospitalisation hors du Japon.