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Rapport

S’informer sur les réseaux sociaux accroît les comportements à risque, selon une étude

Chercher des informations de santé sur les réseaux sociaux plutôt qu’auprès d’un médecin ou d’un média généraliste conduit non seulement à un faible niveau de connaissances médicales, mais aussi à refuser ou abandonner des soins, selon une enquête publiée ce jeudi 23 novembre par la Fondation Descartes.
Salle d'attente à Paris, le 23 août 2023. (Laure Boyer /Hans Lucas. AFP)
publié le 23 novembre 2023 à 18h23

Le citron congelé aide à combattre le diabète et certaines tumeurs, vrai ou faux ? Selon la publication Facebook du 2 avril 2023 du compte Recettes et Délices, la réponse est… vraie. Sur 4 000 Français sondés par la Fondation Descartes (en partenariat avec l’Académie nationale de médecine) dans le cadre d’une étude publiée ce jeudi 22 novembre, 2,6 % y croient également. Plus de la moitié d’entre eux ont répondu qu’ils ne savaient pas. Pourtant, c’est faux.

Ces résultats illustrent un phénomène plus large : chercher des informations de santé sur les réseaux sociaux plutôt qu’auprès d’un médecin ou d’un média généraliste conduit non seulement à un faible niveau de connaissances médicales, mais aussi à refuser ou à abandonner des soins.

«L’information en santé est un sujet qui intéresse les Français. En effet, 42,5 % d’entre eux se disent de «très» à «extrêmement» intéressés par l’information et l’actualité médicales», est-il écrit. Si le rapport assure que dans l’ensemble, «les Français ne se sont pas détournés des médias grand public», il alerte tout de même sur ces personnes qui se fient aux informations sur les réseaux sociaux et leur comportement, comme le refus vaccinal ou le renoncement à un traitement médical conventionnel.

Prenons l’exemple du citron. Non, cet agrume ne combat pas le diabète, ni le cancer, comme peuvent l’affirmer d’autres pages Facebook. Malgré cela, des personnes continuent à y croire : selon l’étude, menée par le sociologue et directeur de la recherche de la Fondation Descartes, Laurent Cordonier, les individus qui s’informent «souvent» à «très souvent» sur des sujets de santé via YouTube sont 2,9 fois plus nombreux que les autres à avoir déjà renoncé à un traitement médical en faveur d’une thérapie alternative.

Pour ceux qui utilisent TikTok comme un moyen de s’informer, ils sont 2,7 fois plus nombreux que les autres à avoir déjà refusé un vaccin recommandé pour eux-mêmes et/ou leurs enfants, hors Covid-19. Ils sont également deux fois plus nombreux à refuser un vaccin pour elles ou leurs enfants (hors vaccin Covid) que celles qui choisissent un autre moyen d’information.

Un climat de méfiance instauré par la pandémie de Covid

Ces croyances traduisent un «sentiment de défiance» envers la médecine conventionnelle. Lors du Covid-19, entre désinformation vaccinale, théories du complot et véritables recommandations, les Français ne savaient plus qui croire. Face à cette «cacophonie informationnelle», le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, avait même affirmé que «les fausses nouvelles se propagent plus rapidement et plus facilement que ce virus et sont tout aussi dangereuses».

Depuis, la santé et le bien-être sont devenus des sujets prioritaires pour la Miviludes, l’organisme gouvernemental qui traque les dérives sectaires. Car depuis le Covid, de nombreuses médecines alternatives ont émergé et ont constitué un terreau fertile pour le développement de conceptions médicales erronées. L’étude vient le confirmer : «Plus les individus sont sensibles aux thérapies alternatives ainsi qu’aux croyances paranormales et new age, plus leur niveau de connaissances en santé est faible.»

Face à cette désinformation, nombre de Français ont renoncé à se faire vacciner : «Les fausses informations sur les vaccins, mais également sur la nutrition ou les cancers, sont répandues et peut-être même plus populaires que les informations médicales exactes.» Si la pandémie est passée, ces croyances erronées subsistent dans l’ensemble du domaine de la santé.

Pour lutter contre ces effets de la désinformation sanitaire, la Fondation Descartes suggère de d’«encourager la diffusion de contenus de santé de qualité, conformes à la connaissance scientifique». Les plateformes, elles, sont déjà tenues au sein de l’Union européenne de veiller à la dangerosité potentielle de leurs contenus en matière de santé notamment depuis l’entrée en vigueur fin août de la nouvelle législation de l’UE sur les services numériques (DSA).