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Décryptage

Symptômes, mortalité, différences avec Zika et dengue… Ce qu’il faut savoir sur l’épidémie de chikungunya qui sévit à la Réunion

Cette maladie virale, transmise par le moustique tigre, a déjà fait deux morts dans l’île de l’océan Indien. «Libération» fait le point sur le virus, les traitements, et les moyens de se protéger.
La dengue, le zika et chikungunya sont trois maladies transmises par le moustique tigre («Aedes albopictus»). (Nih-Niaid/BSIP. AFP)
publié le 21 mars 2025 à 16h39

L’île de la Réunion subit une épidémie de chikungunya, la première depuis 2010. Deux personnes âgées de 86 et 96 ans, «dont une présent [ant] des comorbidités», sont décédées, a annoncé ce vendredi 21 mars la préfecture de l’île. Il s’agit des premiers décès confirmés depuis la reprise de la circulation du virus en août. Le dernier bilan sanitaire, publié mercredi, faisait état de 2 888 cas pour la seule semaine du 3 au 9 mars. «Bien qu’aucune tension n’affecte le milieu hospitalier à ce stade, 77 patients ont été admis aux urgences du 3 au 9 mars. Depuis août 2024, 24 personnes ont été hospitalisées, dont trois cas sévères recensés», indiquait le bilan de l’agence régionale de santé (ARS). La semaine dernière, le préfet de l’île de l’océan Indien a déclenché le niveau 4 du plan Orsec, correspondant à une «épidémie de moyenne intensité». Libé fait le point sur cette maladie virale.

Qu’est-ce que le chikungunya ?

Chikungunya signifie littéralement «qui marche courbé en avant» en makondé (langue d’un peuple d’Afrique australe du même nom). La maladie provoque en effet des douleurs articulaires très fortes altérant la démarche du malade. Ces afflictions s’accompagnent de forte fièvre et de maux de tête. Une maladie très invalidante, donc. Le virus, de la famille des arbovirus, a été identifié pour la première fois en en Tanzanie en 1952, rappelle l’Institut Pasteur. Il a depuis été repéré dans plus de 110 pays selon l’OMS. Dans de nombreuses îles, la transmission a été interrompue car l’infection a immunisé la population. La transmission persiste souvent dans les pays où une grande partie de la population n’a pas encore été infectée. Il est présent de façon permanente (ou endémique) en Afrique, en Asie et en Inde. L’incubation est de deux à douze jours après la piqûre par un moustique infecté. Les symptômes durent généralement quelques jours à quelques semaines.

Comment se traite la maladie ?

Un peu comme pour la grippe, les traitements visent à atténuer les symptômes et non à se débarrasser du virus. Ce processus-là doit être réalisé par le système immunitaire. On prescrit donc des antidouleurs ou des anti-inflammatoires selon les cas. «L’évolution peut être rapidement favorable, si le malade répond bien au traitement symptomatique. Cependant, la maladie peut aussi évoluer vers une phase chronique marquée par des douleurs articulaires persistantes et incapacitantes», écrit le ministère de la Santé. L’Institut Pasteur évoque d’autres complications, rares, comme «des formes neurologiques graves, notamment des méningo-encéphalites et des atteintes des nerfs périphériques. Ces dernières sont principalement rencontrées chez des personnes âgées ou au système immunitaire affaibli, ainsi que chez des nouveau-nés infectés in utero en même temps que la mère».

La mortalité liée au virus est relativement faible, mais pas nulle. En 2005-2006, une épidémie de chikungunya avait touché 260 000 personnes à la Réunion, soit un tiers de la population. Au total, 225 personnes étaient décédées. Entre le 1er janvier et le 25 février, le Centre européen de contrôle et de prévention des maladies compte 14 décès pour 30 000 cas dans quatorze pays. Un vaccin est en cours de déploiement, le Ixchiq. Début mars, la Haute Autorité de santé a préconisé son utilisation à la Réunion pour les personnes à risque de formes graves – c’est-à-dire les personnes âgées de 65 ans et plus ainsi que les personnes de 18 à 64 ans avec comorbidités, n’ayant jamais eu auparavant de diagnostic d’infection par le virus.

Pourquoi l’associe-t-on souvent avec la dengue ou le Zika ?

«La dengue, le chikungunya et le Zika sont des maladies classiquement tropicales dues à des arbovirus», rappelle Santé publique France. Elles sont toutes les trois transmises par le moustique tigre (Aedes albopictus). La surveillance est donc commune, puisqu’elles ont le même vecteur. Le moustique tigre est implanté en France hexagonale depuis 2004 et se retrouve dorénavant sur la grande majorité du territoire. La lutte contre ces maladies est en partie commune puisqu’elle passe par la lutte contre les moustiques. Il convient donc de «limiter sa propre exposition au moustique vecteur» (vêtements longs, produits répulsifs) mais aussi d’éliminer les points d’eau stagnante «qui représentent de potentiels gîtes larvaires : pots de fleurs, pneus usagés, déchets encombrants», rappelle l’Institut Pasteur.

La dengue provoque de fortes fièvres avec nausées et douleurs derrière les yeux. «Chez les personnes fragiles essentiellement, une complication rare est possible : la dengue sévère, dite hémorragique», avec, notamment, des saignements dans les selles et les gencives, précise l’assurance maladie. Le Zika, lui, provoque des syndromes grippaux accompagnés d’éruptions cutanées, de conjonctivite ou d’œdèmes sur les mains ou les pieds. Il peut être transmis par voie sexuelle. Dans les deux cas, le traitement est essentiellement symptomatique.