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Libération
Fausse route

Transport sanitaire partagé : un projet de décret prévoyant jusqu’à 30 km de détour inquiète les associations de malades

Un projet de texte prévoit que les patients contraints d’utiliser le covoiturage en ambulance ou en taxi seront susceptibles de rallonger leur trajet jusqu’à plusieurs dizaines de kilomètres.
Pour rejoindre ou repartir de l’hôpital, les patients sont désormais appelés à partager leur ambulance ou leur taxi. Mais ils pourraient voir leur trajet rallongé jusqu’à 30 kilomètres. (Olivier Chassignole /AFP)
publié le 3 mai 2024 à 18h18

Le principe est voté, mais les modalités d’application risques d’être difficiles à mettre en œuvre pour les malades. Pour rejoindre ou repartir de l’hôpital, les patients sont désormais appelés à partager leur ambulance ou leur taxi. Mais ils pourraient voir leur trajet rallongé jusqu’à 30 kilomètres, selon un projet de décret qui inquiète des associations mais qui reste, selon le ministère, à finaliser.

Sous sa forme actuelle, le texte sur le partage du transport sanitaire, révélé ce vendredi 3 mai par Franceinfo et dont l’AFP a eu copie, prévoit un détour de 10 kilomètres possible par passager transporté, dans la limite d’un détour total de 30 km par trajet. Mais ce n’est pas tout : ils pourraient être amenés à attendre aussi leur véhicule sanitaire au moment du départ. Il est prévu dans le texte qui évoque un «délai raisonnable».

Le projet vise à appliquer une mesure de la loi de financement de la Sécurité sociale 2024. Il «est en phase de concertation», et «encore en train d’être discuté», dit-on au ministère de la Santé. Le seuil de 30 kilomètres par exemple «figure bien dans le projet, mais n’est pas forcément ce qui va être retenu».

Difficile pour les malades dialysés ou en chimiothérapie

Mais des associations de patients s’inquiètent de l’impact de ces changements, notamment pour des malades qui doivent être traités par dialyse ou chimiothérapie. L’association Renaloo, qui représente des patients touchés par une maladie rénale, dialysés ou greffés, a écrit au ministère et à l’Assurance maladie pour réclamer que «ni les délais d’attente ni les retards liés à cette nouvelle organisation des transports ne puissent entraîner une dégradation de la qualité, de la continuité et de la durée des soins». Elle souhaite que les temps de trajet et d’attente soient aussi pris en compte. Autre préoccupation de représentants de malades : aucune obligation de port du masque et de gestes barrières n’est prévue.

Le gouvernement, en quête de plusieurs milliards d’économies dans le budget de la Sécurité sociale (PLFSS 2024), a prévu qu’un patient ne pourra plus refuser un transport sanitaire partagé s’il est possible médicalement, sous peine de devoir avancer les frais et de n’être remboursé que sur la base du transport partagé. A partir de 2025, une pénalité s’appliquerait aussi. Pour obtenir un transport individuel remboursé, le médecin devra spécifier sur l’ordonnance que l’état du patient est incompatible avec un transport partagé.

Selon l’Assurance maladie, les dépenses liées aux transports de patients sont «à un niveau élevé, comparativement à d’autres pays développés». En 2022, elles ont augmenté de 7,2 % à 5,5 milliards d’euros sous l’effet de revalorisations tarifaires et de la hausse du prix des carburants. Depuis fin mars, la franchise restant à la charge du patient sur les transports sanitaires a par ailleurs été doublée, à 4 euros.