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Libération
Dysfonctionnement

Un tiers des défibrillateurs cardiaques hors service en France

D’après l’audit réalisé par une société de maintenance consulté par France Info, près d’un tiers des 500 000 défibrillateurs cardiaques installés dans des lieux publics à travers le pays ne fonctionnent pas. Une association réclame une loi pour obliger les exploitants à s’assurer de leur état de marche.
Si les établissements qui reçoivent du public savent qu'ils ont l'obligation d’installer un défibrillateur, les données récupérées par Matecir Defibril montrent que souvent, ils ne savent pas qu’assurer l’entretien de ces outils leur incombe. (Emmanuel Ortiz/Divergence)
publié le 29 mai 2024 à 10h23

On les distingue dans les hôpitaux, les gares, au bureau mais aussi dans les clubs de sport ou encore dans les lycées… Depuis 2018, tout établissement recevant du public a l’obligation d’installer dans ses locaux un défibrillateur cardiaque. Problème : selon un audit réalisé par une société de maintenance dévoilé ce mercredi 29 mai par France Info, près d’un tiers des 500 000 défibrillateurs cardiaques installés dans les lieux publics de France sont hors service.

Entre 2021 et 2023, 6 021 défibrillateurs automatisés externes (DAE) ont été inspectés par la société Matecir Defibril qui en a tiré des projections sur le reste des dispositifs installés dans le pays. Si les établissements qui reçoivent du public sont au fait de leur obligation d’installer un défibrillateur, les données récupérées par Matecir Defibril montrent que bien souvent ils ne savent pas qu’assurer l’entretien de ces outils leur incombe.

Soucis de maintenance

De quoi alerter Bruno Thomas-Lamotte, président de l’association pour le recensement et la localisation des défibrillateurs (Arlod), qui rappelle sur France Info que l’entretien de ces machines est «obligatoire et indispensable». «Qui est responsable ? C‘est celui qui est l’exploitant, celui qui le met à la disposition du public. Mais derrière, il faut quelqu’un qui surveille sur place, qui vérifie que le défibrillateur clignote bien et marche bien», liste Bruno Thomas-Lamotte. Avant d’évoquer les soucis de la maintenance. «L’exploitant peut faire la maintenance lui-même s’il a les compétences, ou bien il peut s’adresser à des sociétés extérieures qui le font très bien. D’autres prennent un peu d’argent pour envoyer un mail et juste passer un coup de chiffon sur le boîtier. Ce n’est pas ça qui garantit que le défibrillateur va marcher», regrette-t-il.

Par ailleurs, près de 60 % des défibrillateurs inspectés au cours de l’audit ont présenté «une anomalie pouvant entraîner un dysfonctionnement», précise l’Arlod. Face à ce constat, l’association réclame une loi afin d’obliger les exploitants à assurer le bon fonctionnement des défibrillateurs, de la même manière que l’inspection des extincteurs. «Le taux de survie des arrêts cardiaques est très bas en France. Il est de l’ordre de 7 ou 8 %. Avant les défibrillateurs il était de 2 %, donc cela prouve qu’il y a un intérêt», rappelle Bruno Thomas-Lamotte, précisant qu’actuellement «un défibrillateur est utilisé avant l’arrivée des secours dans moins de 10 % des cas».

Colle périmée, piles non changées et consommables qui ne fonctionnent pas

L’implantation des défibrillateurs sur l’ensemble du territoire est une politique engagée depuis 2007 visant à lutter contre la mort subite. D’après les chiffres du ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités, chaque année entre 40 000 et 50 000 personnes sont victimes d’une mort subite faute d’avoir bénéficié de l’aide d’une personne qui aurait pu lui venir en aide en pratiquant les gestes de premiers secours et en utilisant un défibrillateur le temps que les équipes de secours interviennent.

Invité par France Info à réagir, Marc Noizet, président de Samu Urgences de France, était au courant de ces chiffres, liés à des «consommables qui ne fonctionnent pas» ou encore à la colle périmée des patchs autocollants à fixer sur la peau, permettant pourtant de transmettre l’impulsion électrique.

Il a rappelé qu’en cas d’arrêt cardiaque, «chaque minute qui passe, c’est 10 % de chances en moins de s’en sortir». «Il n’est pas prévu dans la loi de sanction si vous ne maintenez pas l’appareil.» Selon lui, il faut demander à l’exécutif de préciser clairement la loi et même d’aller un cran plus loin. «Ceux qui vendent ces appareils ont également une responsabilité pour prévenir les exploitants.» En 2024, dans les situations d’urgence, «dans 10 à 15 % des cas, un défibrillateur est présent». Avant de souligner : «C’est le défibrillateur et le premier témoin qui sont les maillons essentiels. Plus tôt on défibrille, plus tôt on sauve.»