Attention à ne pas crier victoire trop tôt. L’épidémie de variole du singe, cette maladie infectieuse virale, est en plein recul. Depuis la mi-juillet, la courbe des contaminations a très nettement baissé, notamment en Europe de l’Ouest et en Amérique du Nord. Certaines régions du monde en font toujours les frais, notamment en Afrique centrale et de l’Ouest, où circule habituellement l’infection. Des pays d’Amérique centrale et latine connaissent encore une hausse. «On s’achemine vers la fin, mais on n’y est pas encore», déclare le virologue Jean-Claude Manuguerra. Avec plus de 70 000 cas dans une centaine de pays depuis mai, «une épidémie si importante en si peu de temps, c’est du jamais vu», rappelle ce chef de l’unité environnement et risques infectieux à l’Institut Pasteur.
Au mois de mai dernier, des cas de variole du singe (ou Monkeypox), sans lien direct avec un voyage en Afrique du Centre ou de l’Ouest, ont commencé à être signalés en Europe et dans le monde. Depuis, la maladie fait l’objet d’une surveillance renforcée. Le 23 juillet, la maladie est érigée en urgence de santé publique internationale par l’Organisation mondiale de la santé (OMS), et en garde encore aujourd’hui le statut. «Une épidémie qui ralentit peut être plus dangereuse, car on peut penser la crise terminée et baisser notre prudence», a prévenu mi-octobre Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS.
Quatre scénarios
Si l’épidémie décline, c’est en grande partie grâce au changement de comportements au sein des communautés à risque. La vaccination a, elle aussi, joué son rôle. Selon le virologue, le travail des «associations, peut-être plus écoutées que les autorités et plus proches du terrain» a porté ses fruits. Santé Publique France argue en ce sens dans un point de situation au 18 octobre : «le pic de contaminations a eu lieu fin juin /début juillet et le nombre de cas confirmés a diminué depuis.»
Dans l’Hexagone, à la mi-octobre, on dénombre 4 084 cas confirmés d’infection par le virus Monkeypox. En parallèle, 125 534 doses de vaccin de troisième génération ont été administrées. Le vaccin est conseillé en prévention et post-exposition. Son efficacité clinique n’est pas encore étayée par des «données solides», selon l’agence européenne de contrôle des maladies (ECDC), mais elle présente des résultats préliminaires positifs.
«Des incertitudes importantes demeurent sur l’évolution de l’épidémie», souligne l’agence européenne. Ses experts dessinent quatre scénarios. Pile : rebond de l’épidémie, lié notamment au retour de comportements à risque, ou circulation réduite du virus avec des flambées sporadiques. Face : recul persistant de l’épidémie, voire élimination de la maladie en Europe.
Témoignages
Le virus, apparenté à la variole en moins grave, est bien moins contagieux que, par exemple, celui du Covid-19. Le Monkeypox peut être transmis par des rongeurs ou des primates (d’où son nom) et se transmet entre personnes par une lésion de la peau, des voies respiratoires ou des muqueuses. Les cas tendent donc à progresser beaucoup plus lentement. Cet épisode fait l’objet d’une piqûre de rappel : les virus n’ont pas de frontières et la riposte doit être globale, insistent les défenseurs d’une approche combinant santé humaine, animale, environnementale («One Health»).
Dans les zones endémiques d’Afrique centrale et occidentale, l’épidémie, plus létale, découle majoritairement de contacts avec la faune, en milieu rural. «La source africaine reste présente et, dans un contexte où il peut y avoir des mouvements de population, on peut avoir à tout moment de nouveaux cas exportés et une nouvelle vague épidémique», prévient Steve Ahuda Mundeke, chef du département virologie à l’Institut de recherche biomédicale de République démocratique du Congo.
«Les pays d’Afrique font partie intégrante de la réponse mondiale», assurait début octobre Rosamund Lewis, principale experte OMS pour la variole simienne, saluant leur engagement dans une meilleure surveillance et détection du virus, et dans des études sur les traitements et vaccins.