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LGBTQ+

Accusée de gestion défaillante, la direction du Refuge démissionne

LGBT +dossier
Mise en cause en décembre 2020 par une enquête de «Mediapart» dénonçant un management toxique de la part de ses dirigeants, l’association qui héberge de jeunes LGBT chassés par leurs parents annonce se séparer de ses fondateurs.
Lors de la Marche des fiertés, le 29 juin 2019 à Paris. (Camille McOuat/pour Libération)
publié le 19 février 2021 à 16h13
(mis à jour le 19 février 2021 à 16h14)

Dix-huit ans après avoir créé le Refuge, ses dirigeants quittent leurs fonctions. L’association – devenue une fondation en 2020 –, qui héberge des personnes homosexuelles rejetées par leur famille, a annoncé leur départ après la publication d’un audit au vitriol qui a confirmé une gestion erratique.

Le Refuge, qui a accompagné 474 jeunes en 2019, est au centre d’une polémique depuis décembre et des révélations de Mediapart, sur un fonctionnement quasi sectaire et un management agressif de la direction. L’enquête du pure-player dénonçait un «management par la terreur» envers salariés et bénévoles, qui se disaient «broyés», «usés» ou «humiliés» par une direction qu’il «faut aduler». Selon plusieurs témoignages, le président Nicolas Noguier se faisait appeler «papa» par les jeunes et aurait fréquemment donné des «câlins» et des «étreintes». D’autres versions recueillies par Libération faisaient état d’«une forme d’emprise avec ce couple dirigeant», pour qui «il fallait vivre pour l’association». Un salarié sous pression expliquait ainsi «recevoir une centaine de mails par jour avec l’obligation d’y répondre sous quarante-huit heures».

Un diagnostic confirmé par l’audit indépendant publié jeudi. Le document long de 38 pages pointe des «dysfonctionnements structurels […] imposant une réaction forte et urgente». Il étrille notamment son «fonctionnement totalement artisanal», reposant sur «des communications informelles, des relations interpersonnelles et une concentration des prises de décisions sur quelques acteurs».

Climat de défiance et mal-être au travail

L’audit relève par ailleurs «un climat de défiance et un mal-être au travail d’une partie significative des acteurs» de l’association : 52 % des salariés interrogés «estiment que leur charge de travail n’est pas soutenable» et 60 % «ne se disent pas heureux au travail». Il critique également la communication de l’association : plus d’un quart des jeunes interrogés «estiment que leur consentement n’est pas systématiquement demandé pour utiliser leur image sur les réseaux sociaux en particulier».

Des dysfonctionnements en nombre, qui ne laissent guère le choix au fondateur Nicolas Noguier, et son compagnon Frédéric Gal, qui va également quitter ses fonctions de directeur général. En réaction, le conseil d’administration du Refuge, qui a «pris acte» de la démission, a notamment annoncé vouloir mutualiser sa ligne d’écoute avec d’autres associations LGBT, la nomination d’un médiateur et une nouvelle charte du droit à l’image au sein de l’organisation.

«Les dysfonctionnements observés au sein de la fondation le Refuge sont graves», a réagi vendredi sur Twitter la ministre déléguée chargée de l’Egalité, Elisabeth Moreno, en insistant sur l’«exemplarité» imposée par sa mission et en prenant acte de cette démission.