Menu
Libération
Psychanalyse

La maison aux rêves mouillés

Article réservé aux abonnés
Le foyer où nous vivons est souvent perçu comme notre enveloppe corporelle. Elle possède ses zones érogènes, ses voies d’évacuation… et son inconscient. Gare aux architectes qui rêvent d’angles trop droits.
Facade of pink miniature dollhouse (Busa Photography/Getty Images)
publié le 10 juillet 2021 à 9h00

Nous pouvons choisir qui pénètre chez nous. Raison pour laquelle certains cambriolages sont vécus comme des viols. Dans un ouvrage intitulé Maisons. Quand l’inconscient habite les lieux (1), le psychanalyste Patrick Avrane mentionne pêle-mêle toutes sortes d’anecdotes concernant ces maisons marquées par les désirs des personnes qui s’y croisent et s’y succèdent. Il y a des greniers où se cachent des traumas. Des caves où les femmes réglées ne peuvent pas descendre. Des tabous sur certaines portes. Chaque maison possède son genre. «Celles aux murs complètement lisses sont des hommes ; par contre, celles qui sont pourvues de saillies et de balcons auxquels on peut se retenir sont des femmes», remarque Sigmund Freud (Leçons d’introduction à la psychanalyse). Patrick Avrane souligne qu’en français une expression populaire perdure : «Il y a du monde au balcon !»

Bien que son ouvrage – aimable compendium de réflexions mêlant Hitchcock, Proust et Magritte – grappille, sans rigueur, des travaux sur l’histoire de l’habitat, une idée amusante s’en dégage : depuis l’émergence, au XVIIIe siècle, de la notion d’intimité, les maisons se doivent d’avoir des pièces réservées à la vie dite «privée». Mais ces lieux retranchés ne sont-ils pas, avant tout, les refuges du refoulé ? La théorie du psychanalyste s’appuie entre autres sur l’histoire d’un quartier, devenu mythique, situé à Pessac, dans la banlieue de Bordeau