Menu
Libération
Etude

Santé publique France alerte sur l’impact des violences à l’encontre des personnes LGBT

LGBT +dossier
Dans une étude publiée ce lundi, Santé publique France (SPF) révèle l’ampleur de l’impact des discriminations subies sur la santé mentale et physique des personnes LGBTQI+.
La parade annuelle de la marche des fierté en juin 2019 entre Montparnasse et République, à Paris. (Christophe Archambault/AFP)
publié le 17 mai 2021 à 18h27

En 2019, 35% des 1 229 personnes homosexuelles, bisexuelles et transgenres interrogées par l’Ifop avaient déclaré «avoir fait l’expérience d’au moins une forme de discriminations au cours de leur vie, en raison de leur orientation sexuelle ou identité de genre». Aujourd’hui encore, les discriminations à l’encontre des personnes LGBTQI+ restent largement répandues et sont lourdes de conséquences sur leur santé mentale et physique.

Dans une étude parue ce lundi, Santé publique France (SPF) publie pour la première fois un ensemble de chiffres, issus de la littérature scientifique française, qui révèle l’ampleur de ce phénomène. «Ces inégalités et leurs répercussions ne sont pas invisibles et nous espérons qu’elles soient mieux connues pour avoir des leviers d’actions robustes», affirme Geneviève Chêne, directrice générale de SPF lors d’une conférence de presse organisée pour l’occasion.

Les rédacteurs de l’étude se sont d’abord penchés sur les multiples troubles psychiques engendrés par les discriminations et violences. Les personnes LGBTQI+ seraient significativement plus confrontées à des épisodes dépressifs que la communauté hétérosexuelle cisgenre selon le Baromètre santé 2017. «Chez les personnes lesbiennes et bisexuelles par exemple, la prévalence des épisodes dépressifs caractérisés (EDC) dans l’année est deux fois plus importante que chez les hétérosexuelles (respectivement 13% contre 8%) tout comme la prévalence des pensées suicidaires (13% contre 5%)», explique l’étude.

Troubles dépressifs deux fois plus nombreux

Un constat encore plus important parmi les personnes transgenres. «Plus de la moitié (56%) des personnes interrogées [309 personnes trans questionnées via les réseaux sociaux, ndlr] en 2014 déclarait avoir fait une dépression suite à des actes transphobes et 18% une tentative de suicide», affirme l’étude. Et lorsque celles-ci n’entraînent pas de graves troubles psychiques, les experts notent que l’obligation pour certaines personnes de dissimuler leur identité peut engendrer un mal-être conceptualisé comme «stress minoritaire».

Contrairement à la consommation d’alcool (sensiblement identique quelle que soit l’orientation sexuelle), l’expérimentation de produits psychoactifs est plus fréquente chez les personnes homosexuelles et trans, selon le rapport. L’usage accru de psychotropes pourrait, dans certains cas, «être une conséquence des discriminations et violences subies», affirment les rédacteurs.

Inégalité d’accès aux soins

Autre point soulevé par l’étude : les personnes LGBTQI+ souffriraient d’une moindre santé sexuelle. Outre les prévalences élevées de VIH dans la communauté gay et d’autres infections sexuellement transmissibles pour les lesbiennes et les trans, l’accès aux soins poserait également problème.

Face à des praticiens insuffisamment sensibilisés, 19% des personnes LGBT interrogées en 2016 dans le cadre d’une étude EGaLe-MG affirment avoir essuyé des remarques homophobes. Selon cette même étude, 49 % assurent ne pas avoir informé leur médecin de leur orientation sexuelle par peur du jugement. Un constat confirmé par l’infectiologue et directeur général de la Santé, Jérôme Salomon : «Le renoncement aux soins est plus important et les difficultés de dialogue sont souvent accrues avec les professionnels de santé», explique-t-il.

Ce renoncement aux soins est particulièrement criant parmi la communauté de femmes bisexuelles et lesbiennes chez qui on constate un nombre significativement moins élevé de consultation gynécologique. «Parmi les femmes ayant des rapports sexuels avec d’autres femmes interrogées en 2011 dans l’enquête Press Gay et Lesbienne, 36% n’avaient jamais consulté pour raisons gynécologiques, 60% n’avaient jamais eu de frottis cervico-utérin et 90% n’avaient jamais eu de dépistage de chlamydia», peut-on lire dans l’étude.

Pour pallier ce phénomène, des listes de praticiens «LGBTQI+ friendly» ont émergé ces dernières années à l’initiative de collectifs ou associations. La page Gy & Co, créée en 2013 par des militantes féministes, recense par exemple des soignantes féministes et LGBT friendly en France. «Je souhaiterais que tous les professionnels de santé soient 100% LGBTQI+ friendly, affirme de son côté Jérôme Salomon, pour qui ces listes ne sont pas une solution. Il faut former les futurs professionnels de santé sur une approche plus intégrative.»

Pour sensibiliser la population aux violences subies par la communauté LGBTQI+, une vaste campagne de communication vient d’être lancée par le gouvernement en partenariat avec la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah) et Santé publique France. Cette campagne s’accompagnera de 42 actions et 52 mesures concrètes visant à lutter contre toute forme de discrimination à l’encontre de la communauté arc-en-ciel.