William Shakespeare était-il prédestiné par son nom à devenir le plus salace des dramaturges de son temps ? Son prénom contient le mot «génitoire» (will) et son nom peut se traduire «branler» (shake) la «lance» (spear). Coureur de jupons selon les uns, père de famille rangé selon les autres, Shakespeare (1564-1616) reste relativement mystérieux. Né au sein d’une famille aisée de Stratford-upon-Avon, à une heure d’Oxford, il se rend célèbre en son temps comme poète mais l’histoire retient surtout de lui les 39 pièces de théâtre qu’il écrit à bride abattue, dans un climat de terreur – à la fin du XVIe siècle, l’Angleterre est décimée par la peste. «A Londres, près d’un quart des habitants en périrent en 1563 et autant quarante ans plus tard», écrit Jean-Pierre Richard qui, dans un livre lumineux au titre coup de poing – Shakespeare pornographe (éditions Rue d’Ulm) – défend une idée forte : «On savait déjà que Shakespeare glissait des grivoiseries explicites dans ses œuvres. On n’imaginait pas, en revanche, que chacune de ses pièces pouvait se lire à deux niveaux. Même les scènes en apparence les plus nobles contiennent une strate cachée de sens qui relève de la pure gaudriole… Son théâtre est à double-fond. Pratiquement chaque tirade contient un sous-texte lubrique.»
Mots crus à fleur de texte
Traducteur et enseignant (maintenant retraité) à l’université Paris-Diderot, Jean-Pierre Ri