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Libération
Reportage

«Traumatisé», «sans histoire apparente», «solitaire» : dans le Finistère, la vie cachée d’un réfugié ukrainien

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Guerre entre l'Ukraine et la Russiedossier
Retrouvé aux abords de Fouesnant, qui avait ouvert un centre d’accueil pour les déplacés de la guerre en 2022, le corps de Mykhailo Maksakov a été identifié la semaine dernière. Disparu en juillet 2023, l’homme serait mort il y a six mois, «en marge».
Fouesnant s'était mobilisé dès le début de la guerre en Ukraine, en 2022. (Mathieu Rivrin/Getty Images)
publié le 21 septembre 2024 à 15h28

Il est mort sous un tas de branches, au fond du jardin d’une maison bourgeoise. A Beg Meil, un quartier résidentiel de Fouesnant (Finistère) ceint par l’océan. Son corps a été retrouvé le 10 août mais il n’a été identifié que la semaine dernière. Il est mort plusieurs mois auparavant, entre février et avril. Mykhailo Maksakov avait 28 ans. Que sait-on de lui ? Rien. Une misère. Qui peut parler de lui ? Personne. Sa mère le présente comme un ancien soldat ukrainien. Elle n’a pas la force pour plus. C’est elle qui, depuis sa disparition en juillet 2023, a frappé à toutes les portes possibles. A la gendarmerie, à la mairie. Dans les commerces, les paroisses. Là où demeurent les autres réfugiés ukrainiens. Elle a collé des affiches avec le visage de son fils. Elle dit juste : «Maintenant, c’est trop tard.»

Près de là où il a été découvert, une dame jardine. Sécateur à la main, dos courbé, elle relève ses yeux. «Je savais qu’il était recherché, c’est tout.» Mykhailo Maksakov est mort à 50 mètres de chez elle. Elle l’a appris dans le journal. Elle n’a rien vu. A proximité, un couple de voisins balaye son trottoir. Le mari tient le manche à longs poils, la femme la pelle jaune. Lui : «Ce n’était pas un hiver froid, on n’a pas eu de gel, seulement de la pluie, des températures à 8 ou 10 °C. Comment en arrive-t-on là ?» Elle : «Les Ukrainiens, on les croisait quand on allait dans le port. On a discuté avec certains, mais on ne se côtoyait pas beaucoup. Il y a l