Deux décennies après le terrible fiasco judiciaire de l’affaire d’Outreau – un dossier dans lequel, après deux procès aux assises en 2004 et 2005, 13 des 17 accusés pour des faits supposés de pédophilie avaient finalement été acquittés – Franck Lavier se présente à nouveau devant les juges du tribunal correctionnel de Boulogne-sur-Mer. L’électricien de 45 ans comparaît pour agression sexuelle par ascendant sur sa fille, mineure à l’époque où elle a dénoncé les faits. Il risque jusqu’à sept ans de prison et 100 000 euros d’amende.
C. vient d’avoir 24 ans. Elle lui fait face sans le regarder, petite mine chiffonnée sous des cheveux bruns coupés au carré. Sa parole est difficile, hachée. Cette mère de trois filles et un garçon nés entre 2019 et 2023 avance dans ses déclarations par petits pas, guidée avec douceur par le président Manuel Rubio Gullon. En juin 2016, l’adolescente s’était fendue d’une lettre qu’elle avait confiée aux responsables de son établissement scolaire. «Terrible enfance», s’intitulait le courrier – le titre était souligné par deux fois. Elle y évoquait les répercussions de l’affaire d’Outreau sur sa vie, et celles des membres de sa famille. «C’est compliqué de dénoncer une personne que l’on aime, surtout si c’est la personne qui nous a conçu», écrivait-elle sur une feuille à grands carrea