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Une idée «pas si conne que ça» : «Charlie Hebdo» et la famille de Charb demandent l’entrée du dessinateur au Panthéon

Dix ans après l’attaque terroriste de l’hebdomadaire satirique, cette décision «graverait dans le marbre de notre République l’attachement viscéral du peuple français à la liberté d’expression», souligne ce mardi Riss, directeur de la publication.

Charb, dessinateur satirique et directeur de la publication de Charlie Hebdo, à Paris, le 3 novembre 2011. (Stéphane Rémael/Libération)
Publié le 07/10/2025 à 16h49

A la veille de la panthéonisation de l’ancien ministre de la Justice Robert Badinter, la rédaction de Charlie Hebdo et les parents de Charb font ce mardi la demande pour que le dessinateur, tué dans l’attaque jihadiste contre l’hebdomadaire satirique il y a dix ans, fasse lui aussi son entrée au Panthéon. «Charb coche toutes les cases pour s’y retrouver» et ses «valeurs» étaient «exactement celles de notre démocratie», défend Riss, qui lui a succédé à la tête de Charlie Hebdo, dans son édito à paraître mercredi.

Il est «un journaliste exécuté pour ses opinions par des terroristes sur le territoire national» et l’idée d’une panthéonisation n’est ainsi «pas si conne que cela», appuie-t-il. Charb l’aurait-il validée ? Non, mais il n’est pas question «d’une récompense ou d’un honneur», mais de «valeurs» qu’il représente, répond encore Riss auprès de l’AFP. Selon le dessinateur de 58 ans, «quelle que soit l’issue de cette demande, l’intérêt est aussi d’entretenir, de réveiller la réflexion autour des valeurs de Charb et du journal».

«Ancrer définitivement cet événement dans l’histoire du pays»

Une telle décision d’entrée au Panthéon «graverait dans le marbre de notre République l’attachement viscéral du peuple français à la liberté d’expression», souligne aussi dans son édito le directeur de la publication, qui avait été lui-même grièvement blessé le 7 janvier 2015. L’attentat avait fait douze morts, dont huit membres de la rédaction à Paris, parmi lesquels d’autres figures de la caricature comme Cabu et Wolinski.

«Nous souhaiterions ancrer définitivement cet événement dans l’histoire du pays, par un acte fort et fédérateur», ont pour leur part écrit les parents de Charb et son frère dans leur requête au président de la République, également publiée par Charlie Hebdo. Outre la liberté d’expression, ils évoquent «l’antiracisme», «la justice sociale» et «la laïcité», «valeurs éminemment républicaines pour lesquelles Charb s’est battu toute sa vie et qui rassemblent la très grande majorité des Français de toutes opinions et de toutes confessions».

La demande est faite à l’occasion des vingt ans de la publication de 12 caricatures de Mahomet dans le quotidien danois Jyllands-Posten, à l’origine de violentes manifestations dans certains pays musulmans. Ces dessins avaient été repris en 2006 par l’hebdomadaire français, en faisant ensuite une cible des jihadistes. Republiées à plusieurs reprises, elles sont reproduites à nouveau dans l’édition de mercredi, pour marquer «l’anniversaire d’une manipulation internationale», titre Charlie Hebdo.

«Cette publication (en 2005-2006) ainsi que l’attentat du 7 janvier 2015 furent des événements considérables. Aujourd’hui, ils sont devenus des faits historiques» et des rues, des places portent des noms des victimes, constate Riss, qui a avancé cette idée de panthéonisation auprès de la famille de son ami, mort à 47 ans. Avec d’autres membres de la rédaction, il se rend régulièrement auprès de lycéens et d’étudiants. «Ce n’est pas aberrant de faire rentrer au Panthéon quelqu’un de cette génération», un «contemporain».