La peinture provoque un tollé depuis jeudi. Il y a de quoi. Réalisée sur un transformateur électrique à l’entrée nord-est d’Avignon, une fresque représentant Emmanuel Macron en Pinocchio, manipulé par un Jacques Attali marionnettiste, fait abondamment réagir depuis que des photos circulent sur les réseaux sociaux. Elle est signée du graffeur Lekto, un habitué des lieux. Alors qu’il a un temps été envisagé de la laisser en l’état, en dépit de très nombreuses protestations, la communauté d’agglomération du Grand Avignon, propriétaire du bâtiment, devrait finalement l’effacer, comme l’annonce France Bleu Vaucluse ce vendredi matin.
De mauvaise grâce, manifestement, puisque c’est «à l’insistance du préfet» que la décision aurait été prise, d’après la radio locale. Le Grand Avignon et la ville d’Avignon disaient la veille «vouloir respecter la liberté d’expression» et estimaient que «chacun peut interpréter l’image comme il veut puisqu’il n’y a pas de mot sur ce mur». Elle est pourtant intitulée «La Bête 2 l’événement», une référence cryptique en vogue dans la sphère complotiste.
Iconographie antisémite classique
Quoi qu’il en soit, avant même que les autorités n’agissent, un ou plusieurs anonymes sont allés barbouiller la fresque jeudi soir. Elle a été «recouverte de peinture par des jeunes de la ville», explique l’ancien conseiller communautaire Amine El-Khatmi, qui publie une photo de la fresque recouverte sur les réseaux sociaux.
La fresque antisémite d’Avignon a été recouverte de peinture ce soir par des jeunes de la ville. Fier d’eux 💙❤️
— Amine El-Khatmi (@Aminelkhatmi) June 23, 2022
Elle sera effacée dans les règles de l’art ce vendredi par une entreprise mandatée par le Grand Avignon. Merci à tous ceux qui se sont mobilisés. #antisémitisme pic.twitter.com/ad1QJLp3os
Plusieurs personnalités et associations avaient demandé son retrait en raison des références antisémites et complotistes de la fresque. Le comité juif américain a notamment interpellé sur Twitter la maire, Cécile Helle, lui demandant «pourquoi cette fresque antisémite est toujours là».
«Il faut vraiment ne jamais avoir ouvert un livre d’Histoire pour ne pas voir à quel point cette image reprend tous les codes de la propagande antisémite et de l’iconographie fasciste. Refuser de l’effacer au nom de la «liberté d’expression» est un scandale», estimait de son côté l’eurodéputé Raphaël Glucksmann.
La symbolique du marionnettiste contrôlant le monde en coulisses, le pouvoir politique manipulé par de grandes puissances, la tenue vestimentaire apprêtée et les gants blancs (tout juste manque-t-il le chapeau haut-de-forme) : la fresque coche effectivement de nombreuses cases de l’iconographie antisémite classique.
Le graffeur Lekto n’en est pas à son coup d’essai sur le transformateur électrique en question. Un tour sur sa page Instagram permet de voir d’autres fresques à l’inspiration politique douteuse. Par exemple un Olivier Véran inquiétant, presque extraterrestre, entouré de seringues. Ou encore une effigie de Francis Lalanne, le chanteur devenu complotiste, célébré en Astérix des temps modernes.