Centre-ville de Lens, Pas-de-Calais, ce vendredi en fin de matinée : «Il y a du monde en ville», remarque une cliente, guillerette, devant les jambes gainées de collants du présentoir. «C’est normal, tout est fermé demain !» rétorque Maïté, la vendeuse de cette boutique de lingerie, un maillot de bain dans les mains. Depuis deux semaines, elle baissait le rideau le samedi, avec le confinement du week-end dans le département. Mais avec les annonces du Premier ministre, jeudi soir, il a été généralisé pour quatre semaines au moins, dans tous les Hauts-de-France. Seuls les commerces essentiels restent ouverts. Les boutiques de vêtements, entre autres, devront donc tirer le rideau. «On fait quand même notre vitrine, on n’a pas le choix, il faut donner envie aux gens de revenir», soupire Maïté. Elle vient de recevoir la nouvelle collection, celle de l’été. Avec sa collègue Michèle, elles reconnaissent que la fermeture des centres commerciaux de périphérie a été un bienfait. «Les gens sont revenus dans le centre-ville et ont redécouvert notre savoir-faire», s’enthousiasme Michèle.
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Une fleuriste de l’autre côté de la rue est moins convaincue : «On est des bouche-trous.» Renoncules orange et blanches sur le comptoir, Mirjana Mladenovic ne sait pas encore à quelle sauce son magasin va être mangé. Elle a juste reçu la nuit dernière un mail de sa fédération sur les négociations en cours. «J’espère qu’on va avoir le droit au click and collect», croise-t-elle les doigts. Tout est bon à prendre pour payer ses charges – 2 000 euros de loyer par mois. Tout compte fait, elle pourra rester ouverte. Ce manque d’informations agace le maire PS de la ville, Sylvain Robert. Il a adressé une lettre ouverte à Emmanuel Macron, sur les aides aux commerçants du Pas-de-Calais, touchés avant les autres avec le confinement à la carte. «Bruno Le Maire a évoqué la prise en charge des loyers des centres commerciaux, mais aucune mesure n’a été identifiée pour les centres-villes, note-t-il. A Lens, le foncier est détenu par les anciens commerçants, et les loyers constituent une part souvent importante de leur retraite. Des impayés peuvent mettre en difficulté d’autres catégories de la population.»
Chez Gerdan Coiffure, près du stade Bollaert, fauteuils clubs et murs bleu canard, l’ambiance est (presque) à la fête : Julien Dumontier, le propriétaire, a appris ce vendredi matin qu’il allait échapper au confinement. «Jusqu’à hier, on était fermé à 18 heures et le week-end, ce qui voulait dire entre 35 et 40% de chiffre d’affaires en moins. Maintenant, on ferme à 19 heures, et on reste ouvert le samedi. C’est magnifique, j’applaudis. Tu confines pour avoir moins d’interactions, et en fait, tu as plus de liberté», se moque-t-il. Jeudi, il avait anticipé une fermeture générale, et donc ouvert en grand son amplitude horaire ce vendredi, pour couper cheveux et barbes en nombre. «Dès 7h15 ce matin, j’avais la queue devant chez moi, cinq clients qui attendaient», témoigne-t-il. A midi, son salon est encore comble, ça discute sur le manque de logique des mesures prises. Un client vanne : «Dès lundi, ils vont vacciner tous les coiffeurs, et tous les clients des coiffeurs, c’est le nouveau protocole !»
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