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Renoncement

L’avenir de l’aéroport de Nantes dans un trou d’air après l’annulation de l’appel d’offres

L’Etat a annulé le 29 septembre l’appel d’offres pour une nouvelle concession et d’importants travaux à l’aéroport Nantes-Atlantique. Ce lundi 2 octobre, Clément Beaune a annoncé un nouvel appel d’offres et reconnaît un décalage d’«environ deux ans».

L'aéroport Nantes-Atlantique en février 2023. (Maylis Rolland/Hans Lucas. AFP)
ParMarine Dumeurger
correspondante à Nantes
Publié le 01/10/2023 à 15h59, mis à jour le 02/10/2023 à 15h28

Attention, zone de turbulences. La décision est tombée vendredi 29 septembre au soir : l’Etat a annulé l’appel d’offres pour la remise en concession de l’aéroport de Nantes-Atlantique. Plus de cinq ans après l’abandon du projet de Notre-Dame-des-Landes, l’aéroport de Nantes semble toujours embarqué dans des vents contraires, ballotté entre les difficultés de son agrandissement, un contexte économique tendu et le mécontentement croissant des élus locaux et des riverains.

Cela pourrait être une bonne nouvelle pour l’environnement si, pendant ce temps-là, le trafic aérien ne continuait pas, lui, de croître. Pour expliquer sa décision, le ministère de la Transition écologique invoque le manque de concurrence (il ne restait plus qu’une entreprise en lice, le groupe Vinci Airports), ainsi qu’une série de raisons disparates, allant du contexte économique global à la crise sanitaire en passant par la guerre en Ukraine.

A Nantes ce lundi 2 octobre, le ministre des Transports Clément Beaune a assuré que le nouvel appel d’offre sera lancé « d’ici la fin de la l’année ». « On ne repart pas de zéro (...) On avance en saisissant cette occasion pour faire mieux, notamment sur le plan écologique. On ne perd pas de temps : un mois de concertations, je reviens (à Nantes) et d’ici la fin de l’année, on lance la procédure », a expliqué Clément Beaune devant la presse, après avoir rencontré dans la matinée élus locaux et représentants des chambres consulaires. Le ministre prévoit un décalage « d’environ deux ans » du projet de réaménagement.

«Incurie totale de l’Etat»

Dans le centre de Nantes, nul besoin de trop lever la tête pour repérer aux heures de pointe le défilé constant des avions, à quelques centaines de mètres d’altitude. Au moment de l’abandon de Notre-Dame-des-Landes en 2018, une idée surgit : allonger la piste d’atterrissage de l’aéroport de Nantes-Atlantique de 400 mètres, afin de relever l’altitude des avions lorsqu’ils survolent la ville. Pourtant, très vite, elle ne convainc plus personne. En juin 2022, les vingt-quatre maires de la métropole, toutes tendances confondues, envoient un courrier à la Première ministre, Elisabeth Borne. Ils interrogent l’utilité d’un tel aménagement qui figure dans le programme de travaux soumis à l’appel d’offres.

Le voilà désormais annulé, provoquant un cortège de réactions. La présidente socialiste de la métropole et maire de Nantes, Johanna Rolland, dénonce «l’incurie totale de l’Etat» et estime qu’au moins dix ans vont s’écouler entre «l’abandon de 2018 et le début de la réalisation de travaux dont on ne sait toujours rien». A Rezé, une des villes voisines de l’infrastructure, la maire divers gauche Agnès Bourgeais a reconnu pour sa part «un soulagement, mais pas une garantie […] Les problèmes persistent et l’aéroport va continuer à nuire à la vie et à la santé» des habitants. Christelle Morançais, la présidente divers droite du conseil régional des Pays de la Loire dénonce le «gâchis» pour le territoire. Le Medef soutient par ailleurs que l’aéroport ne survivra pas sans travaux.

«Nous avons de quoi être méfiants»

Au Collectif des citoyens exposés au trafic aérien, qui milite contre le développement des aéroports urbains notamment pour des raisons sanitaires, la nouvelle ne soulève pas un grand enthousiasme. «L’Etat est empêtré. Nous attendons de voir ce qui va être annoncé», fait valoir à Libération son président Paolo Ferreira. Cette semaine, l’association publiait justement ses chiffres des entorses au couvre-feu : selon elle, pas moins de 480 vols ont eu lieu aux heures interdites entre minuit et 6 heures, depuis sa mise en place en avril 2022. «Forcément, nous avons de quoi être méfiants !» tacle le collectif.

En réalité, l’aéroport de Nantes a beau chercher des parades, tels le projet d’allonger sa piste, mettre en place une «double approche» pour les avions (c’est-à-dire à utiliser deux trajectoires différentes lors des atterrissages) ou instaurer un couvre-feu, la source de ses nuisances est ailleurs. En dix ans, son trafic a plus que doublé. En 2022, il a accueilli près de 6 millions de passagers et en prévoit plus de 10 millions à l’horizon 2040.

La semaine dernière, la compagnie low-cost Volotea annonçait cinq nouvelles destinations au départ de Nantes-Atlantique. De passage, son fondateur Carlos Muñoz se félicitait de dépasser l’offre d’Air France sur les liaisons nationales, et vantait sa stratégie de «relier les villes de taille moyenne sans passer par la capitale et à des prix compétitifs». De quoi faire encore augmenter le trafic aérien depuis le département de Loire-Atlantique.

Mis à jour lundi 2 octobre : avec l’annonce d’un nouvel appel d’offres.